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Comment penser les rapports de l’homme avec la nature ? Cette question aujourd’hui rĂ©sonne immĂ©diatement en termes de crise Ă©cologique menaçante pour l’avenir de l’humanitĂ©. Loin de nous l’idĂ©e moderne » de l’homme promĂ©thĂ©en domestiquant la nature Ă  son grĂ© et lui imposant sa toute puissance
 Nous savons en effet maintenant que nous n’arrivons plus Ă  assurer la maintenance de tous les effets non prĂ©vus de notre action sur l’environnement, et que cette crise est devenue planĂ©taire
 Nous parlons volontiers Ă  ce sujet de revanche de la nature », et bizarrement cette derniĂšre a tendance de plus en plus Ă  devenir l’arbitre moral de notre conduite le bien serait souvent du cĂŽtĂ© de la nature
 Cette situation nouvelle est peut-ĂȘtre l’occasion de mettre Ă  plat » l’histoire de notre pensĂ©e sur la nature et les liens que nous sommes censĂ©s entretenir avec elle ; et peut-ĂȘtre de dĂ©passer cette ancienne dualitĂ© entre l’homme et la nature que notre Ă©poque moderne a longtemps vĂ©hiculĂ©e
 Et ne nous y trompons pas revisiter ces rapports entre l’un et l’autre, c’est aussi la possibilitĂ© d’influer significativement sur nos nouvelles politiques environnementales
 Daniel Mercier, le 02/11/2012 L'Ă©crit philosophique Comment penser les rapports de l’homme et de la nature ? » Quelques lectures
parmi beaucoup d’autres
 Le TimĂ©e, Platon De rerum natura, LucrĂšce Principes de la philosophie, Descartes L’Ethique, Spinoza Le discours sur l’origine des inĂ©galitĂ©s parmi les homme, JJ Rousseau Le contrat naturel, Michel Serres, Le nouvel ordre Ă©cologique, Luc Ferry Du bon usage de la nature. Pour une philosophie de l’environnement, C et R LarrĂšre, 2009 Le principe responsabilitĂ©, Hans Jonas, Almanach d’un comtĂ© des sables, Aldo LĂ©opold, 1948 Ethique de la terre, Baird Callicott, 2010 recueil d'articles de l'auteur La sagesse des modernes, AndrĂ© Comte-Sponville et Luc Ferry L’empire du milieu, Bruno Latour ConsidĂ©rations sur l’idĂ©e de nature, François Dagognet Par delĂ  nature et culture, Philippe Descola L'Effet Darwin. SĂ©lection naturelle et naissance de la civilisation, 2008, Patrick Tort AussitĂŽt cette question formulĂ©e, c’est le constat de crise Ă©cologique profonde de notre monde qui vient aussitĂŽt Ă  l’esprit, et les changements qui peuvent et doivent intervenir
 Puis peut-ĂȘtre l’idĂ©e de la responsabilitĂ© du dĂ©veloppement Ă©conomique sur ces problĂšmes environnementaux, associĂ©e Ă  celle d’une croissance sans frein que semble porter l’idĂ©ologie libĂ©rale. Peut-ĂȘtre n’est-il pas inutile de rappeler les dimensions principales de cette crise il ne s’agit plus seulement de prĂ©occupations finalement normales » de tout groupe humain confrontĂ© aux consĂ©quences non intentionnelles de ses activitĂ©s sur son environnement par exemple, nous nous prĂ©occupons depuis longtemps des siĂšcles de protection d’une nature menacĂ©e terroirs, eaux, forĂȘts avec un certain succĂšs ; ou encore nous rĂ©agissons contre les effets incontrĂŽlĂ©s des techniques industrielles et de la concurrence Ă©conomique sur la santĂ© et la vie des individus pollutions de l’air, des eaux, du sol, stockage de produits radio-actifs ou chimiques, accumulation d’ordures non biodĂ©gradables et non recyclĂ©es, installation d’habitats ou d’infrastructures dans des zones soumises Ă  des risques naturels
 il reste encore beaucoup Ă  faire 
. Mais aujourd’hui, nous sommes confrontĂ©s Ă  un troisiĂšme type de prĂ©occupations qui correspond Ă  la globalisation des problĂšmes environnementaux en une crise de dimension planĂ©taire, qui se traduit en divers scĂ©narios dont les trois principaux sont l’épuisement des ressources Ă©nergĂ©tiques notamment fossiles – la surpopulation 7Milliards aujourd’hui et 9 Ă  10 milliards prĂ©vu en 2050 – le changement climatique dĂ» Ă  l’émission de gaz Ă  effet de serre. En arriĂšre plan de cette crise, une extinction des espĂšces jusque lĂ  inĂ©galĂ©e, oĂč les activitĂ©s humaines semblent jouer un rĂŽle significatif ce que l’on appelle la biodiversitĂ© serait en danger. En effet ce sont ces constats qui viennent spontanĂ©ment Ă  l’esprit
 Mais la perception que nous en avons dĂ©pend de la façon plus ou moins implicite dont nous pensons les relations de l’homme avec la nature qui l’entoure cette derniĂšre formulation se veut pour l’instant faussement innocente », au sens oĂč elle ne prĂ©juge en rien des Ă©lĂ©ments de rĂ©ponse futurs Ă  cette question
. Le diagnostic que nous faisons et non seulement le constat, et les perspectives que nous devons tracer, mettent en jeu des pensĂ©es philosophiques divergentes sur l’analyse de ces rapports de l’homme avec la nature. Comment alors penser ces rapports est une question philosophique essentielle car sous-jacente Ă  toute politique environnementale
 L’idĂ©e qui servira de fil rouge » dans ce dĂ©veloppement est la suivante cette nouvelle situation de crise Ă  laquelle nous sommes confrontĂ©s peut ĂȘtre aussi l’occasion d’une nouvelle façon de penser ces rapports entre l’homme et la nature ; aidĂ©e en cela aussi par la profonde crise de confiance que connaĂźt aujourd’hui l’optimisme de la pensĂ©e des LumiĂšres croyance que les lumiĂšres de la raison, notamment grĂące aux progrĂšs de la science et de toute forme de connaissance, permettront d’éliminer l’obscurantisme et de construire le bonheur de l’humanitĂ© en l’aidant Ă  rĂ©soudre ses principaux problĂšmes. L’histoire de la pensĂ©e de ces rapports dans notre pĂ©riode moderne est celle d’une dualitĂ© et d’une opposition, parfois dĂ©signĂ©e comme une lutte entre humanistes et naturalistes, contrairement Ă  la vision de la nature des grecs et des romains pour laquelle cette opposition n’a pas de sens. Nous voudrions dĂ©fendre l’idĂ©e d’un dĂ©passement de cette dualitĂ© et d’un retour renouvelĂ© Ă  cette pensĂ©e antique reconnaĂźtre la spĂ©cificitĂ© de l’homme tout en affirmant aussi sa filiation avec la nature, n’échappant pas lui-mĂȘme aux grands mouvements de l’évolution et des mĂ©canismes systĂ©miques en jeu dans cette communautĂ© Ă©cologique dont il fait partie. Mais il faut commencer par se coltiner » cette notion si problĂ©matique de nature »  A DerriĂšre la polysĂ©mie, un arbitre moral ? La notion de nature est redoutable pas moins de 11 sens dans l’usage philosophique vocabulaire Lalande, et autant pour l’usage commun rĂ©pertoriĂ©s dans le Petit Robert. Sans compter aussi les variations trĂšs importantes de sens concernant la notion de nature humaine », Ă©videmment convoquĂ©e dans notre sujet
 Avant d’essayer d’y voir clair, et malgrĂ© cette polysĂ©mie dĂ©routante, une constante apparaĂźt aujourd’hui dans l’utilisation que nous faisons de ce qui est nature » ou naturel » la connotation positive qui semble y ĂȘtre attachĂ©e. Le naturel est bon, authentique, simple, essentiel, nĂ©cessaire 
 Le non-naturel est la plupart du temps artificiel, mais aussi affectĂ©, factice, accidentel, contingent
 etc. L’intĂ©rĂȘt pour les mĂ©decines naturelles, l’agriculture naturelle » ou biologique, la cosmĂ©tologie naturelle », pour une nature qui serait vierge de toute empreinte humaine 
etc. n’est plus Ă  dĂ©montrer. Peut-ĂȘtre cette valorisation est rĂ©actionnelle Ă  l’inquiĂ©tude provoquĂ©e par les consĂ©quences nĂ©gatives de l’activitĂ© technique et productive sur l’environnement
 Peut-ĂȘtre aussi s’agit-il d’une constante anthropologique apparaissant de maniĂšre plus ou moins spectaculaire selon le contexte historique
D’oĂč la difficultĂ© d’aborder une question dont nous pressentons Ă  quel point elle est imaginairement chargĂ©e affectivement. Il semblerait que la nature joue le rĂŽle d’arbitre et d’autoritĂ© morale par rapport au comportement humain. Souvent personnifiĂ©e, elle serait l’instigatrice d’une justice immanente. Pourquoi c’est naturel » veut-il dire c’est bien », ou bien c’est Ă©vident », ou bien encore on n’y peut rien » ? VoilĂ  par exemple des questions qui, depuis des annĂ©es, intriguent Lorraine Daston cf. Sciences Humaines N° 236 - avril 2012. Pourquoi, lorsqu’on parle dans la presse de l’ouragan Katrina, on dit la nature a pris sa revanche » ? Pourquoi la nature est venue sanctionner le comportement humain
 » Ă  Fukushima ? 
etc. Ce qu’il semble y avoir derriĂšre cette rĂ©fĂ©rence Ă  la nature, c’est qu’elle reprĂ©sente un certain ordre auquel il est nĂ©cessaire de se soumettre il n’y a pas si longtemps, on justifiait aussi la domination du pater familias au sein de la cellule familiale par la diffĂ©rence des sexes et ce n’est pas certain que cette reprĂ©sentation soit complĂštement disparue. Les manipulations gĂ©nĂ©tiques sur les plantes trĂšs anciennes ; n’entrons pas ici dans la polĂ©mique autour des OGM sont toujours suspectes pour les mĂȘmes raisons ; mais aussi les produits chimiques qui, d’une certaine façon, enfreignent un certain ordre naturel
 Les exemples d’une telle mĂ©fiance sont innombrables. Nous avons le sentiment que ces interventions mettent en question un ordre, un Ă©quilibre, dont nous faisons partie. B DĂ©finitions
 Essayons donc maintenant de mettre de l’ordre dans la polysĂ©mie de la notion de nature. Nous avons schĂ©matiquement regroupĂ© les nombreux sens mentionnĂ©s dans le Lalande, en laissant Ă  l’écart ceux qui nous paraissaient trop Ă©loignĂ©s de notre sujet. Trois sens qui nous paraissent synthĂ©tiser l’ensemble la nature dĂ©signe Ă  la fois les propriĂ©tĂ©s essentielles de l’ensemble des ĂȘtres leur essence » ou leur nature », elle est tout ce qui existe », mais ce sens peut inclure le principe qui organise l’ensemble de ce qui existe selon un certain ordre les lois de la nature », et enfin la nature dĂ©signe ce qui se fait sans intervention de l’homme le contraire d’artificiel. C A chacun sa nature humaine Il est nĂ©cessaire Ă©galement d’examiner rapidement la notion de nature humaine, pour en dĂ©gager – de maniĂšre excessivement schĂ©matique – trois concepts sensiblement diffĂ©rents la nature humaine relevant de l’espĂšce » ; acception biologisante, contre laquelle les sciences humaines se sont constituĂ©es. Pour l’essentiel, les sciences sociales se sont constituĂ©es contre l’idĂ©e d’une nature humaine, assimilĂ©e Ă  une idĂ©e rĂ©actionnaire, voire dangereuse elle enfermerait les humains dans une camisole de gĂšnes, d’hormones et de neurones, condamnant chacun Ă  une sorte de destin biologique. Cependant, les neurosciences mettent aujourd’hui plus en avant la plasticitĂ© neuronale ou l’épigenĂšse l’influence de l’environnement sur les gĂšnes ou l’incroyable capacitĂ© rĂ©gĂ©nĂ©ratrice des cellules souches pour souligner les capacitĂ©s d’auto-transformation des humains. La nature humaine comme fond commun originel de tous les hommes, auquel se rattache l’idĂ©e de besoins, de droits naturels, de libertĂ© naturelle commune, d’égalitĂ© tous les hommes naissent Ă©gaux en droit ». Fondement des droits de l’homme dans la pensĂ©e des LumiĂšres. La fiction rousseauiste de l’état de nature » Ă©tant une des figures principales de cette nature humaine avant qu’elle ne soit corrompue par la sociĂ©tĂ© thĂšme du Discours sur l’origine des inĂ©galitĂ©s parmi les hommes. C’est ainsi que Rousseau considĂšre l’homme comme naturellement bon et droit ». La troisiĂšme signification entretient des liens avec la seconde. La nature humaine comme raison ; la pensĂ©e grecque et latine est traversĂ©e par cette idĂ©e d’une nature humaine qui est en partie assimilable Ă  la raison. C’est par exemple chez Aristote, la partie la plus haute de l’ñme, de caractĂšre divin. Toute la philosophie occidentale Descartes, Spinoza, Kant
 s’inscrit dans cette assimilation. Nature peut ĂȘtre ici rapprochĂ©e du concept d’essence. Mais chez les modernes », contrairement aux anciens », une telle conception de la nature humaine et sans doute aussi la conception rousseauiste renvoient Ă  une rupture ou une dualitĂ© entre l’homme et la nature, la question de la libertĂ© faisant ligne de partage. Les sciences sociales ont Ă©galement mis radicalement en question l’essentialisme de cette nature raisonnable, aidĂ©es par l’existentialisme affirmant le primat de l’existence sur l’essence. MĂȘme si la sociologie refuse Ă  la fois l’une et l’autre conception d’un homme qui Ă©chapperait Ă  tout dĂ©terminisme au nom d’une libertĂ© transcendantale. Pour elle, l’ĂȘtre humain est culturĂ© de part en part, et ne peut donc ĂȘtre une nature ». Il est trĂšs significatif de constater que les termes de l’opposition entre l’homme et la nature varient mais que l’opposition elle-mĂȘme est toujours prĂ©sente dans un premier temps, c’est la nature humaine comme libertĂ© et comme raison qui est opposĂ©e aux dĂ©terminismes naturels de l’univers et de l’évolution le philosophe prototypique de cette orientation pourrait ĂȘtre Kant ; dans un deuxiĂšme temps, c’est la culture comme spĂ©cificitĂ© humaine qui prend le relai et s’oppose au monde de la nature tel que les sciences dures » peuvent en rendre compte. Mais entrons davantage dans le vif du sujet »  D L’Age d’or et PromĂ©thĂ©e Ces notions Ă©tant explicitĂ©es dans leur complexitĂ© et leurs variations de sens, comment comprendre maintenant l’histoire philosophique des rapports de l’homme avec la nature ? Mais l’origine de la philosophie se trouve dans la mythologie celle-lĂ  n’est que le prolongement de cette derniĂšre, un logos » prenant progressivement la place du muthos ». Il y a dans cette mythologie des grecs deux mythes fondateurs et en partie contradictoires qui semblent avoir Ă©tĂ© structurants dans l’histoire de notre humanitĂ©, avoir tenu une place de choix dans notre imaginaire collectif ; le premier est celui d’un Age d’or qui fait toujours rĂ©fĂ©rence Ă  un Ă©tat harmonieux et Ă©ternel, se traduisant par une intĂ©gration originelle parfaite entre la nature de l’homme et la Nature le jardin d’Eden Ă©tant en quelque sorte exemplaire de ce point de vue dans la culture chrĂ©tienne
. L’homme fondamentalement bon de l’état de nature rousseauiste participe Ă©galement de la mĂȘme mythologie. Ecouter Ă©galement la trĂšs belle chanson de LĂ©o FerrĂ© intitulĂ©e l’Age d’Or ». Le second est celui du mythe promĂ©thĂ©en d’un homme hors nature », celui qui va voler le feu aux dieux, qui incarne un homme qui ne cesse de s’inventer lui-mĂȘme et de conquĂ©rir son environnement par les progrĂšs de ses sciences et de ses techniques, le faisant entrer ainsi dans l’histoire d’une aventure humaine indĂ©cise tendue vers un futur porteur de promesses sans cesse renouvelĂ©es. Le logos philosophique se substituant au muthos, et le rationnel Ă  la mĂ©taphore, elle va poursuivre par d’autres moyens une exploration de notre condition qui ne sera jamais Ă©trangĂšre Ă  ces deux pĂŽles. Mais arrĂȘtons-nous un instant sur les deux grands moments de la philosophie concernant cette question des rapports de l’homme avec la nature la philosophie antique et la philosophie des modernes. E AntiquitĂ© grecque et latine la grande unitĂ© Le cosmos nature et la nature humaine constitue un tout harmonieux, fini, et hiĂ©rarchisĂ©, l’homme en Ă©tant l’élĂ©ment central. Ma nature est insĂ©rĂ©e dans La nature. Ce tout » est dans une certaine mesure constituĂ© avec la mĂȘme substance un mixte de raison et de matiĂšre, de logos et de phusis » la phusis reprĂ©sente Ă  la fois l’ensemble du processus de la nature, le principe dont toutes choses sont issues, et le rĂ©sultat de ce qui est produit, ou encore un mĂ©lange d’intelligence et de nĂ©cessitĂ© », Dans le TimĂ©e de Platon, est affirmĂ©e la prĂ©sence d’une causalitĂ© intelligente et divine qui imprime son ordre et sa beautĂ© au dĂ©sordre initial assimilable au chaos originel. La nature humaine est ici dans son Ă©lĂ©ment naturel, si je puis dire
 ExceptĂ© pour les Ă©picuriens, cette reprĂ©sentation de l’homme dans l’univers est finaliste et anthropocentrĂ©e. La raison en est le principe organisateur essentiel. La nature humaine doit ĂȘtre rapprochĂ©e ici de l’animal raisonnable d’Aristote. Comme les anciennes mythologies, la philosophie a pour fonction d’inscrire l’ordre humain dans l’ordre cosmique exceptĂ© les sophistes qui opposaient le conventionnalisme des hommes et de la CitĂ© Ă  une forme de naturalisme sans aucune mesure avec celui de Platon ou d’Aristote, mais qui Ă©tait proche de la loi du plus fort ». Il est intĂ©ressant de remarquer Ă  ce sujet que quelque soit le concept de nature auquel on fait rĂ©fĂ©rence, il sert toujours de justification. Platon par exemple refuse de dĂ©coupler phusis dont se prĂ©occupe la philosophie naturelle » et nomos, physique et Ă©thique les philosophies antiques articulent toujours en un tout cohĂ©rent physique et Ă©thique. Imiter l’univers », telle est le mot d’ordre, celui d’une politique vraiment conforme Ă  la nature. ». L’épicurisme reprĂ©sente une exception LucrĂšce De rerum natura », dans la filiation de la physique de DĂ©mocrite, ne pense pas l’univers de la mĂȘme maniĂšre les mondes sont infinis, les choses y surviennent par hasard, la terre produit sans plan préétabli. F ModernitĂ© le grand partage Elle introduit une dualitĂ© et une sĂ©paration de l’homme et de la nature. C’est le moment du grand partage, qui se dĂ©cline aussi dans les dimensions essentielles suivantes sujet/objet ; libertĂ©/nĂ©cessitĂ© ; morale/physique ; naturalisme/humanisme ; et plus tard sciences de la nature/sciences de l’homme et naturel/social Changement de paradigme concernant l’univers Ă  la vision d’un univers clos, hiĂ©rarchisĂ© et gĂ©o-centrĂ© d’Aristote, succĂšde la vision galilĂ©enne, puis keplerienne et newtonienne infinie, non hiĂ©rarchique, non gĂ©o-centrĂ©e. C’est une rĂ©volution scientifique contre le sens commun le soleil tourne autour de la terre, et se couche chaque soir. L’univers est dĂ©sormais unifiĂ©, et non partagĂ© entre le monde cĂ©leste et le monde sublunaire soumis Ă  la corruption. Natura naturata » Les interrogations sur l’univers portent sur le comment beaucoup plus que sur le pourquoi, et il s’agit de dĂ©gager les rĂšgles du changement qui intervient dans la nature c’est la naissance de la mĂ©canique classique. Sur un plan Ă©pistĂ©mologique, la modernitĂ© opĂšre un dĂ©centrement l’observateur est dĂ©sormais extĂ©rieur Ă  la nature observĂ©e, et l’expĂ©rimentation obĂ©it Ă  un ensemble de procĂ©dures de production standard » d’un objet c’est-Ă -dire rĂ©pĂ©tables Ă  volontĂ©, et de vĂ©rification des connaissances. L’expĂ©rience est mathĂ©matisĂ©e et la nature est celle de la mĂ©canique. Descartes montre qu’un artifice peut ĂȘtre abordĂ© comme une nature, et rĂ©ciproquement une nature comme une machine, en vertu des lois mĂ©caniques qui sont identiques dans les deux cas. Cette nature se veut dĂ©finalisĂ©e, tout en reprenant le projet platonicien de rendre intelligible le rĂ©el Ă  partir de la gĂ©omĂ©trie, assemblage de figures, grandeurs en mouvements ». Toutes les choses qui sont artificielles sont avec cela naturelles » Principes de la Philosophie, Descartes. Elle ne peut durer sans l’intervention constante de Dieu chez Descartes principe de la crĂ©ation continuĂ©e, est assimilable Ă  une natura naturata » beaucoup plus qu’à une natura naturans », c’est-Ă -dire une nature active, productrice, non pas comme créée, simple rĂ©sultat d’un processus, mais se produisant elle-mĂȘme, c'est-Ă -dire Ă  une machine que l’on peut dĂ©composer en piĂšces distinctes. C’est l’argument du fabricant ». Simple chose Ă  la disposition de l’homme, stable, fixe, aux lois Ă©ternelles. Dieu a crĂ©e la Terre Ă  l’usage des hommes. Il s’agit d’en devenir maĂźtre et possesseur » Descartes. Nous retrouvons plus tard la mĂȘme conception de la nature chez Kant, construite cette fois par les catĂ©gories du sujet. La dĂ©finition qu’il donne de la nature est Ă  ce titre exemplaire l’ensemble des choses qui obĂ©issent Ă  des lois physiques et mathĂ©matiques universelles et nĂ©cessaires ». La nature est entiĂšrement soluble dans l’entreprise de mathĂ©matisation et la rĂ©gularitĂ© mĂ©canique des lois naturelles d’enchaĂźnement des phĂ©nomĂšnes. La natura naturans, plus ou moins menaçante et ne se prĂ©occupant pas de l’homme va en quelque sorte ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©e » par lui sous l’espĂšce d’une nature natura. Celle-ci est l’oeuvre de la connaissance et de son appropriation du rĂ©el nous trouvons chez Levinas cette idĂ©e que toute connaissance en tant que rationnelle est une sorte d’amputation qui consiste Ă  nier l’autre au profit du mĂȘme grĂące au concept. Le projet de la modernitĂ© par rapport Ă  la nature semble exempt de tout finalisme 
 Descartes est le premier Ă  critiquer le finalisme aristotĂ©licien, mais surtout Spinoza dans son Ethique » va Ă©chafauder une critique radicale du finalisme qui revient Ă  considĂ©rer toutes les choses Ă©tant dans la nature comme des fins Ă  son usage ». Kant utilise Ă  ce sujet un argument qui va retourner la critique spinoziste, et montrer par la-mĂȘme toutes les limites de cet antifinalisme Certes il n’y a pas de fins dans la nature mais seulement chez l’homme en tant qu’ĂȘtre moral, mais nous avons besoin de faire comme s’il y en avait, pour des raisons surtout morales ; en effet, la finalitĂ© est une maniĂšre d’accorder l’homme et la nature dont il est sĂ©parĂ©. Il reconduit ainsi, mais cette fois-ci en la justifiant, l’illusion finaliste dĂ©noncĂ©e par Spinoza. C’est bien parce que la nature n’est faite pour aucun usage que l’homme peut en user comme il veut. La justification de l’instrumentalisation de la nature Ă  des fins humaines est ici manifeste. Mais affirme un anthropocentrisme conquĂ©rant
 Cela prĂ©suppose bien entendu une extĂ©rioritĂ© radicale de l’homme. Kant distingue ainsi l’ordre de la nĂ©cessitĂ© naturelle de l’ordre de la libertĂ© propre Ă  l’homme. Cette conception de l’homme empire dans un empire », capable de s’arracher de ses dĂ©terminations naturelles et d’exercer sa domination, critiquĂ©e par Spinoza, sera cependant trĂšs dominante. Pour illustrer ce paradigme de l’homme promĂ©thĂ©en, citons le philosophe Francis Bacon fin XVIĂšme siĂšcle, dĂ©but XVII qui affirme L’empire de l’homme sur les choses n’a d’autre base que les arts et les sciences, car on ne peut commander Ă  la nature qu’en lui obĂ©issant ». Etendre l’empire et la puissance du genre humain tout entier sur l’immensitĂ© des choses », telle est sa profession de foi. L’extĂ©rioritĂ© de l’homme La modernitĂ© institue la rupture ontologique de l’ordre humain par rapport Ă  la nature. Il est dans l’essence de l’humain de pouvoir en quelque sorte en sortir, de s’arracher Ă  ses dĂ©terminations naturelles, et faire ainsi deux » avec elle. Cette acte de libertĂ© au dĂ©part de cette arrachement, c’est prĂ©cisĂ©ment le trait absolument distinctif qui fonde le statut de l’humain cf. Qu’est-ce que l’homme ? », Luc Ferry. Le penseur type de cette altĂ©ritĂ© est bien sĂ»r Kant l’enracinement dans la vie relĂšverait ainsi d’un naturalisme qui interdirait l’humanisme c’est en tant qu’ĂȘtre moral la capacitĂ© Ă  distinguer le bien du mal, et Ă  faire des choix en consĂ©quence, que l’homme peut s’arracher Ă  la dimension corporelle du sentir. PrĂ©server sa vie, maintenir les conditions de vie de l’humanitĂ© sur Terre peuvent ĂȘtre bien sĂ»r des obligations indirectes, mais en tant que tel on prĂ©serve son animalitĂ© et non son humanitĂ©. La distinction est radicale entre l’humanitĂ© comme espĂšce biologique et l’humanitĂ© comme moralitĂ©. Citons ici la critique de Merleau-Ponty qui nous paraĂźt des plus pertinentes l’homme n’est pas un animal auquel s’ajouterait une raison. Nous sommes une autre corporĂ©itĂ© » dans laquelle notre raison est prĂ©sente. Il n’y a pas coupure, mais continuitĂ© corporelle La vie comme histoire est enveloppante par rapport Ă  notre pensĂ©e. Nous sommes en elle. ». La grande exception Ă  ce modĂšle humaniste au sens de l’humanisme thĂ©orique » que lui a donnĂ© Althusser et anthropocentrĂ© est la conception de l’homme comme Ă©lĂ©ment de la nature dĂ©veloppĂ©e dans l’Ethique de Spinoza. Comme nous l’avons notĂ©, avec l’avĂšnement des sciences sociales, c’est l’irrĂ©ductibilitĂ© de la culture par rapport Ă  la nature qui va prendre le relai de cette conception d’une nature humaine raisonnable et libre avec des diffĂ©rences selon que les philosophies sont essentialistes ou existentialistes pour rĂ©activer cette dualitĂ© entre l’homme et la nature qui devient dualitĂ© nature/culture G Et aujourd’hui ? Position du problĂšme Notre conception moderne des rapports entre l’homme et son environnement semble chaque jour un peu plus Ă©branlé  . L’ùre de la rĂ©volution industrielle et de la croissance Ă©conomique vertigineuse du dernier siĂšcle ne peut pas ne pas ĂȘtre rattachĂ©e Ă  cette idĂ©e cartĂ©sienne de l’homme maĂźtre et possesseur de la nature ». A partir d’un point de vue trĂšs anthropocentrĂ©e, la nature est avant tout affaire de conquĂȘte, de domination, d’exploitation. Cette vision instrumentale de la nature ne prend son sens et sa valeur que relativement Ă  la vie humaine, aux services qu’elle peut lui rendre, ou aux problĂšmes qu’elle peut lui causer. Mais n’oublie-t-on pas, dans cette reprĂ©sentation promĂ©thĂ©enne d’un homme hors nature » Luc Ferry ou surnaturel » Edgar Morin, l’existence de limites naturelles inhĂ©rentes Ă  notre maison » ou habitat » oĂŻkos » en grec ? Cette sĂ©paration entre ces deux ordres », solidaire d’une reprĂ©sentation de la nature comme natura naturata opposĂ© Ă  natura naturans, ce qui est vivant dans la nature, et donc susceptible de devenir et de dĂ©gradation, c'est-Ă -dire gigantesque Meccano, objet physique Ă©ternel non susceptible de dĂ©gradation, a longtemps conduit Ă  penser l’économie et la politique comme appartenant au seul rĂ©gime de la culture, et facilitĂ© l’oubli de la fragilitĂ© et de la limitation des ressources naturelles. La rationalitĂ© Ă©conomique se dĂ©veloppe alors en dehors de toute considĂ©ration Ă©co-logique. Le libĂ©ralisme, mais au-delĂ  tout le mouvement de l’économie elle-mĂȘme, se rattache Ă  cette reprĂ©sentation du monde. A partir de Heidegger notamment, un grand courant de contestation radicale va dĂ©nonçer l’arraisonnement » de la nature et l’attitude de prĂ©dation de l’homme dans ses rapports avec elle. Heidegger est le premier grand philosophe Ă  dĂ©noncer la technique moderne comme maniĂšre d’arracher de l’énergie et du profit Ă  la nature ; d’autres aprĂšs lui, en particulier dans le prolongement du rapport alarmiste du club de Rome 1972, prolongeront sa rĂ©flexion Hans Jonas son Ă©lĂšve, Ivan Illich, AndrĂ© Gorz, l’économiste allemand F. Schumacher. Les pensĂ©es contemporaines de la DĂ©croissance en France, Serge Destouche et de la Deep Ecology » surtout reprĂ©sentĂ©es dans le monde anglo-saxon s’inscrivent dans un tel hĂ©ritage. Elles sont parfois associĂ©es Ă  une revendication esthĂ©tique d’une proximitĂ© de la nature, d’un rejet radical de l’industrialisation, du refus d’une science qui conduirait Ă  l’oubli de l’ĂȘtre inspirĂ© directement de Heidegger, faisant ainsi Ă©cho aux pensĂ©es romantiques, mais aussi ce n’est pas contradictoire aux pensĂ©es les plus traditionnalistes. Il est instructif de remarquer que ces deux reprĂ©sentations antagonistes des rapports entre l’homme et la nature ont ceci en commun de penser ces rapports sur un mode dualiste. Cette alternative se retrouve dans les dĂ©bats autour de l’écologie, oĂč l’on voit traditionnellement les naturalistes » s’opposer aux humanistes, un peu comme s’il s’agissait de choisir entre nature et culture. Les humanistes » n’envisagent la prise en compte des problĂšmes d’environnement que du point de vue anthropocentrique peut-ĂȘtre vaudrait-il mieux dire aujourd’hui socio-centrĂ© », et considĂšrent toujours que, fondamentalement, la puissance technicienne parviendra Ă  les rĂ©soudre, continuateurs de la croyance maintenue au progrĂšs tel que les LumiĂšres en ont promu l’idĂ©e. Sans nier les effets pervers de l’exploitation de la nature, ils font confiance aux dĂ©veloppements des sciences et des techniques pour trouver les remĂšdes. Dans une certaine mesure, le discours d’un certain Ă©cologisme dĂ©nonçant cette vision relĂšve lui aussi d’une opposition entre l’homme et la nature il critique l’extĂ©rioritĂ© de l’homme et plaide pour une insertion plus grande, mais ce faisant suppose la rĂ©alitĂ© d’une telle extĂ©rioritĂ©. En ce sens, il reconduit une approche qui relĂšve toujours de la modernitĂ©, mĂȘme s’il en inverse les signes. Les soubassements philosophiques de tous les mouvements radicaux reconduisent l’opposition homme/nature, qui est cette fois-ci diabolisĂ©e et rendue coupable de tous les pĂȘchĂ©s passĂ©s et de toutes les malĂ©dictions futures. Dans les mouvements les plus extrĂȘmes, les thĂšmes de la souillure » ou de l’outrage » d’une nature originairement vierge et intacte les connotations religieuses sont bien prĂ©sentes
 sont rĂ©currents. La nature a ici une valeur en elle-mĂȘme ; elle est elle-mĂȘme sa propre fin, en dehors de toute rĂ©fĂ©rence anthropologique. Il faut donc remplacer l’anthropocentrĂ© » par le biocentrĂ© », subordonner l’homme au destin de la Nature, pour retrouver une harmonie dĂ©sormais perdue. L’homme doit abandonner son arrogance passĂ©e pour dĂ©sormais se ranger sous la dĂ©pendance des fins assignĂ©es Ă  la nature en elle-mĂȘme. Car dans cette perspective, certains Rolston par exemple vont faire appel Ă  la morale kantienne appliquĂ©e Ă  tous les ĂȘtres vivants chaque organisme est une fin en soi », donc susceptible d’une valeur morale intrinsĂšque. Nous voyons bien qu’une telle pensĂ©e est en quelque sorte le symĂ©trique ou l’envers de la prĂ©cĂ©dente, se situe dans une position de contre-dĂ©pendance vis-Ă -vis d’elle, et peut donc ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme relevant du mĂȘme paradigme, celui de la modernitĂ©. Question posĂ©e est-il possible de dĂ©passer de telles alternatives ? Comment penser un rapport qui ne soit pas d’extĂ©rioritĂ©, et qui ne relĂšve pas non plus d’un finalisme de ce nouveau dieu que serait la nature ? H Etre de nature ? Etre de culture ? S’il est vrai que l’avĂšnement des sciences sociales relaie Ă  leur maniĂšre ce grand partage » entre l’homme et la nature, il est nĂ©cessaire de s’y arrĂȘter un instant il est en effet impossible d’envisager les rapports de l’homme avec la nature sans penser en mĂȘme temps qu’il est un ĂȘtre de culture. Cette question des rapports de la nature et de la culture ne va pas cesser de hanter les penseurs des sciences sociales. Une nature introuvable ? Une culture qui fait des phrases » avec la nature 
 Rousseau, qui a abordĂ© cette question dans son second Discours, est considĂ©rĂ© par Levi Strauss a juste titre comme un fondateur ; mais nous savons que l’état sauvage de l’homme Ă  l’état de nature, la relation qu’il entretient avec une nature vierge, trouvant un Ă©quilibre qui, de l’aveu mĂȘme de Rousseau, n’aurait jamais dĂ» ĂȘtre perturbĂ©, est irrĂ©mĂ©diablement une fiction commode mais sans validitĂ© empirique nous n’aurons jamais accĂšs Ă  cette version originale de la nature. Car la culture, qui nous distingue de tous les autres ĂȘtres vivants, se charge de faire des phrases » Françoise HĂ©ritier avec la nature nous ne pouvons qu’ĂȘtre en prĂ©sence de formes culturelles et construites de rapports de l’homme avec la nature. Mais cela ne signifie pas nĂ©cessairement que nous sommes hors nature », que notre monde humain Ă©chapperait Ă  cette appartenance naturelle. Contrairement Ă  ce que pensait Rousseau, il ns semble pas y avoir une telle rupture entre la nature et les sociĂ©tĂ©s humaines sa thĂšse c’est en sortant de la nature que l’homme entre dans un Ă©tat social de plus en plus corrompu. La motivation de Rousseau est de pouvoir lĂ©gitimer sa critique de la sociĂ©tĂ© en dĂ©lĂ©gitimant celle-ci comme abus, corruption, et artifice par rapport Ă  un idĂ©al qui reprĂ©senterait la nature de l’homme. La rupture entre nature et sociĂ©tĂ© est radicale. Penser le passage nature-culture ? Pourtant, un courant dominant des sciences sociales, aprĂšs Levi-Strauss, et en convergence avec ceux qui soutiennent la thĂšse de l’exception humaine, privilĂ©gie l’altĂ©ritĂ© des deux ordres naturel et culturel, et refuse de penser l’articulation ou le passage de l’un Ă  l’autre. Cette rupture entre les deux ordres est considĂ©rĂ©e comme principielle, constitutive d’une altĂ©ritĂ© ontologique. Pour les autres, qui s’inscrivent plutĂŽt dans une perspective darwinienne, il y a certes une discontinuitĂ© du fait humain et social, mais aussi une appartenance humaine au processus de l’évolution naturelle. Ils sont alors soucieux de penser le passage ou l’articulation, dans le registre de la continuitĂ©/discontinuitĂ©. Rappelons trĂšs sommairement quelques unes de ces explications En rĂ©alitĂ©, il s’agit de montrer comment le phĂ©nomĂšne humain a pu se dĂ©gager des processus naturels de l’évolution, grĂące Ă  des Ă©volutions autonomes qui ne se rĂ©duisent pas Ă  de simples lois ou mĂ©canismes biologiques. Ce sont gĂ©nĂ©ralement des arguments proches des thĂ©ories de la complexitĂ© qui expliquent l’émergence de propriĂ©tĂ©s nouvelles Ă  partir d’élĂ©ments dont la simple combinaison ne permet pas de rendre compte Le dĂ©calage humain » thĂšse qui semble ĂȘtre en consonance avec la thĂ©orie du chaos » Gilles-Escuret, aprĂšs Leroi-Gouran, explique qu’il peut suffire d’une petit dĂ©calage humain »au dĂ©part pour rendre compte du grand Ă©cart constatĂ© au terme du processus de l’évolution. Pour Leroi-Gouran, l’homme va placer hors de lui-mĂȘme, dans l’espace potentiellement commun Ă  tous les autres, les outils, condition d’une mĂ©moire technique qui devient collective. Gilles-Escuret ajoute le langage commun qui ainsi projetĂ© dans cet espace collectif, va dĂ©multiplier les ressources de cette mĂ©moire, source de la transmission indispensable Ă  l’émergence du fait social. Cette mĂ©moire collective va libĂ©rer la technique de l’instinct et de la seule imitation des gestes, et ouvrir le champ de la culture, c’est-Ă -dire des traditions et des reprĂ©sentations collectives. L’ effet rĂ©versif ». Patrick Tort, philosophe et spĂ©cialiste de Darwin, dĂ©veloppe ainsi le concept d’effet rĂ©versif la culture est un effet de la nature et donc de l’évolution, mais en un sens paradoxal ; la sĂ©lection naturelle sĂ©lectionne la civilisation, qui s’oppose Ă  la sĂ©lection naturelle. La culture est bien un produit de la nature envisagĂ©e Ă©volutivement, mais qui nie la nature dans ses formes de fonctionnement antĂ©rieures ; elle est une anti-nature produite par la nature elle-mĂȘme
 ». L’homme n’est pas un ĂȘtre hors-nature », mais un ĂȘtre naturel transformĂ© ou dĂ©naturĂ© ». La rupture ainsi introduite n’est pas transcendante et ne renvoie pas Ă  un dualisme mĂ©taphysique. La dualitĂ© ainsi produite est une production immanente de l’un des deux termes par l’autre, et dans un Ă©quilibre lui-mĂȘme mouvant
 » Yvon Quiniou.Comme le dit AndrĂ© Comte-Sponville, un ĂȘtre culturel, c’est un ĂȘtre naturel transformĂ©, c’est donc un ĂȘtre naturel, et qui le demeure. ». Une pensĂ©e en conjonction » Edgar Morin pour lui, ce sont les cloisonnements disciplinaires qui sont responsables de telles pensĂ©es disjonctives paraissant infranchissables. La rupture dĂ©fendue parfois entre l’homme et la nature laisserait entendre que l’homme n’est plus qu’esprit et culture mais s’il est naturel, alors on en fait un chimpanzĂ©, et que l’homo sapiens surgirait comme Minerve de la cuisse de Jupiter avec la raison, le langage, et la technique prĂȘts Ă  fonctionner ! ». Il faut au contraire reconstituer le roman de l’hominisation, et c’est la tĂąche qu’il se propose de rĂ©aliser dans L’IdentitĂ© Humaine volume IV de sa MĂ©thode. Sans bien sĂ»r entrer dans cette mĂ©thode, il s’agit de rendre compte de la rĂ©alitĂ© humaine dans toutes ses dimensions biologique, sociale et individuelle, Ă  partir du paradigme de la complexitĂ© et de ses diffĂ©rentes clĂ©s » causalitĂ© circulaire, principe dialogique, principe hologrammatique, principe de rĂ©cursion, postulat de l’émergence. J Une nature de part en part anthropisĂ©e » De fait nous sommes d’emblĂ©e confrontĂ©s Ă  un ensemble complexe oĂč la nature et les Ɠuvres humaines y compris l’homme lui-mĂȘme ne sont pas sĂ©parĂ©es. Nous ne pouvons penser et percevoir qu’une nature humanisĂ©e, Ă  partir des rapports sociaux pour utiliser un concept marxiste que nous avons construits. Une nature par consĂ©quent dĂ©jĂ  construite, que nous ne pouvons percevoir que depuis la sociĂ©tĂ©, dans un rapport qui ne peut ĂȘtre qu’un rapport social et culturel. Une manifestation concrĂšte de ce rapport social Ă  la nature est le phĂ©nomĂšne de la techno-sphĂšre » ou techno-nature ». Elle est faite de tous les objets, instruments, vĂ©hicules, bĂątiments, citĂ©s, mais aussi de champs et de forĂȘts que nous plions Ă  notre volonté D’infrastructures aussi, Ă©lĂ©ments constitutifs de paysages entiĂšrement anthropisĂ©s ». La maĂźtrise du laboratoire chĂšre aux premiers travaux scientifiques s’est maintenant Ă©tendue Ă  l’ensemble de la planĂšte
 Si bien qu’il est lĂ©gitime de se demander, comme le fait Tintin dans la Lune HergĂ©, s’il y a encore un lieu oĂč la main de l’homme n’a jamais mis les pieds ». Les systĂšmes Ă©cologiques de la planĂšte sont tous anthropisĂ©s, c’est-Ă -dire qu’ils intĂšgrent dĂ©sormais l’intervention humaine, non pas comme un Ă©lĂ©ment Ă©tranger, mais comme faisant partie intĂ©grante de l’écosystĂšme. La nature n’existe pas » ? Pour certains, cette anthropisation » massive doit nous conduire Ă  proclamer haut et fort la victoire de l’artificialitĂ© François Dagognet ConsidĂ©rations sur l’idĂ©e de nature ». Nous sommes dans le monde de l’artifice, et nous n’avons plus besoin du concept de nature pour penser la crise environnementale. Selon lui, il s’agit d’une notion molle et dangereuse » et sans vrai contenu », qui peut seulement ĂȘtre utilisĂ©e comme croyance fausse pour contrecarrer l’emballement de l’industrie sous la logique du profit. La nature n’existe pas, car elle est socialement construite Cesse le possible recours Ă  la notion sĂ©culaire de nature. Il faut la congĂ©dier, son temps est fini. Adieu Ă  Pan ! ». C’est finalement l’issue logique du discours de la modernitĂ© tardive qui finit par considĂ©rer que l’homme, ĂȘtre d’anti-nature, est parvenu Ă  s’arracher dĂ©finitivement Ă  la nature en la transformant grĂące Ă  son travail de ce point de vue bien sĂ»r, le marxisme s’inscrit de plein pied dans ce mouvement. Selon Jonas, il est l’expression la plus achevĂ©e de l’utopie technicienne, avec ses notions de dĂ©veloppement illimitĂ© des forces productives, de sociĂ©tĂ© d’abondance
etc.. Il est cependant facile d’objecter Ă  l’argument que si la nature vierge est en effet devenue un mythe, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de nature. Pour une raison simple pour qu’il ait construction, il faut bien qu’il y ait aussi matiĂšre Ă  construction, ou plus exactement matiĂšre premiĂšre... Par ailleurs, le fait social », mĂȘme s’il est irrĂ©ductible Ă  tout autre –c’est le prĂ©supposĂ© mĂ©thodologique posĂ© par Durkheim pour fonder la raison d’ĂȘtre de la sociologie -, n’interrompt ni les processus naturels nĂ©cessaires Ă  la vie, ni ceux que mobilise la technique elle se doit pour ĂȘtre efficace d’utiliser des processus naturels. Comme le disait si bien Bacon, elle ne peut ĂȘtre dominatrice par rapport Ă  la nature qu’en s’y soumettant. Que penser alors de la techno-sphĂšre qui s’étend Ă  toute la terre et dont nous dĂ©pendons ? Il y a artificialisation de la nature et naturalisation de nos artifices nous ne pouvons distinguer, dans tout ce qui nous entoure, ce qui relĂšve du naturel et ce qui relĂšve de l’artificiel. En outre, un nouvel objet technique, devient de facto un nouvel objet de la nature c’est le cas par exemple du devenir d’une poĂȘle Ă  frire au fond du jardin que la nature va finir par reprendre. Les objets dont nous n’avons plus la maintenance finissent par Ă©chouer » dans la nature pour en devenir des Ă©lĂ©ments. DĂ©chets, dĂ©tritus, Ă©paves, gaz d’échappement des voitures, nitrates en excĂ©dent pesticides, fumĂ©es d’usines, sel rĂ©pandu sur les routes
etc. tous ces produits ont un avenir naturel que nous ne maĂźtrisons pas. Finalement, ces objets que nous pouvons qualifier d’hybrides sont partout. C’est aussi ce qu’affirme Bruno Latour dans L’empire du milieu » les objets sont Ă  la fois naturels et sociaux. Beaucoup sont au cƓur de la crise environnementale le trou dans la couche d’ozone, l’effet de serre, les pollutions de toutes sortes, sont des objets naturels, parce que rĂ©glĂ©s par des processus que nous ne maĂźtrisons pas, et artificiels a cause du rĂ©sultat de notre action sur le milieu. Lui aussi nous invite Ă  abandonner le concept de nature, et Ă  nous intĂ©resser aux interactions entre les vivants, et entre les vivants et les non-vivants les objets, pour veiller Ă  la co-existence pacifique des humains, des non-humains, et des choses, plutĂŽt que de dĂ©fendre une nature verte et bucolique aux gens des villes rĂ©calcitrants ». I Vers une autre conception de la nature 
 1 Il est difficile de continuer Ă  concevoir l’extĂ©rioritĂ© de l’homme et de la nature les hommes, leurs aptitudes, les sociĂ©tĂ©s et leurs activitĂ©s, l’humanitĂ© elle-mĂȘme sont en continuitĂ© avec la nature. L’histoire humaine n’est-elle pas dans le prolongement de la nature et de sa propre histoire ? Dire que l’homme est un animal » dĂ©naturalisĂ© » ne signifie pas qu’il n’est pas un ĂȘtre naturel, au contraire
 Pour ĂȘtre dĂ©naturalisĂ© », il faut bien ĂȘtre issu de la nature. Nulle sĂ©paration ontologique, donc, entre les deux. En mĂȘme temps, il est important de reconnaĂźtre la portĂ©e du dĂ©calage humain » d’autres formulations peuvent aussi ĂȘtre retenues
. 2 La nature apparaĂźt d’autant moins extĂ©rieure qu’elle comprend nos ouvrages techniques au titre d’objets hybrides d’une part, et d’autre part Ă  cause du devenir naturel de tous les produits que l’on rejette. La nature associe nos Ɠuvres » Ă  l’infinie variĂ©tĂ© des organismes qui co-habitent avec nous. La contemplation d’un paysage, surtout dans nos vieilles contrĂ©es rurales – qu’il s’agisse du bassin de la mĂ©diterranĂ©e, de la vieille Europe, ou de l’extrĂȘme orient – suffit Ă  comprendre Ă  quel point la nature est anthropisĂ©e. 3 La nature a une histoire intĂ©grant la prĂ©sence humaine. Contrairement Ă  ce que nous laissait croire les premiĂšres thĂ©ories Ă©cologiques, elle n’est pas un systĂšme harmonieux et en Ă©quilibre que l’intervention humaine dĂ©sĂ©quilibrerait. L’histoire de l’humanitĂ© elle-mĂȘme est issue de l’histoire de la nature, et si cette derniĂšre possĂšde des mĂ©canismes auto-rĂ©gulateurs, elle est rĂ©guliĂšrement soumise Ă  des processus chaotiques » et des perturbations dĂ©terminĂ©es mais imprĂ©dictibles, dans lesquels l’action humaine prend sa place, souvent comme facteur nĂ©gatif, parfois dans un sens positif. 4 Ce dernier point fait rĂ©fĂ©rence Ă  de nouveaux modĂšles Ă©cologiques au sens de la science Ă©cologique dont les caractĂ©ristiques se rĂ©sumeraient ainsi en simplifiant au maximum
 - La nature est une hiĂ©rarchie de systĂšmes constituĂ©e de niveaux d’organisation ayant chacun, au niveau qui leur est propre, des propriĂ©tĂ©s Ă©mergentes qui introduisent de la discontinuitĂ© dans la continuitĂ©. - La nature comme naturans, c’est avant tout la diversitĂ© des formes de vie, d’oĂč l’intĂ©rĂȘt d’une part de les inventorier et de les comprendre nous sommes trĂšs loin du compte pour l’un comme pour l’autre
, et d’autre part de s’efforcer de la prĂ©server alors que nous vivons une pĂ©riode d’extinction sans prĂ©cĂ©dent des espĂšces, en partie due Ă  l’activitĂ© humaine, car La diversitĂ© est la base de l’adaptabilitĂ© des ĂȘtre vivants et peut-ĂȘtre des systĂšmes Ă©cologiques et de la biosphĂšre toute entiĂšre, face aux changements qui peuvent affecter leur environnement ». - Enfin, l’écosphĂšre systĂšme complexe des interactions entre la biosphĂšre et la gĂ©osphĂšre est unique dans notre systĂšme solaire et susceptible de se voir perturber par l’expansion de notre techno-nature. L’équilibre actuel qui caractĂ©rise son fonctionnement peut ĂȘtre modifiĂ© par l’ensemble des activitĂ©s humaines. Pour conclure ce point, il est important de remarquer que l’ancienne Ă©cologie dite Ă©cosystĂ©mique » avait tendance Ă  reproduire le geste d’exclusion de l’homme en le percevant comme un ĂȘtre d’anti-nature qui bouleverse et dĂ©truit des Ă©quilibres qui sont pensĂ©s dans ce modĂšle comme inhĂ©rents Ă  tout Ă©cosystĂšme, considĂ©rĂ© comme stable. En ce sens, un tel modĂšle Ă©tait en quelque sorte moderne, puisqu’il reproduisait la dualitĂ© homme/nature. Or nous savons aujourd’hui que le dĂ©sĂ©quilibre est la rĂšgle et que tout systĂšme de cette nature est en perpĂ©tuel changement, soumis Ă  des phĂ©nomĂšnes de perturbations naturels ou humains, l’équilibre idĂ©al et fixe Ă©tant un mythe. L’histoire contemporaine des systĂšmes Ă©cologiques puisqu’ils ont avant tout une histoire ! associe dĂ©sormais les deux sortes de perturbations naturelles et anthropogĂšnes. Chez un Ă©cologue comme Blaudin, on trouve par exemple la notion de fait socio-naturel ». 5 La fausse idĂ©e d’une nature qui nous serait extĂ©rieure et qui serait Ă  protĂ©ger Les trĂšs nombreuses actions menĂ©es depuis le XIXĂšme siĂšcle en faveur de la protection des espĂšces et du territoire comme par exemple les rĂ©serves naturelles montrent qu’il s’agit de prendre soin d’une nature qui n’est pas extĂ©rieure Ă  l’homme mais qui portent les marques des activitĂ©s productives qui se sont succĂ©dĂ©es. La prospĂ©ritĂ© de certaines espĂšces animales dĂ©pend aujourd’hui d’une structure paysagĂšre qui a Ă©tĂ© produites par les pratiques agricoles et sylvicoles. Bien loin de laisser faire la nature », il faut parfois intervenir pour entraver le dĂ©veloppement de successions biocĂ©notiques » En Ă©cologie, une biocĂ©nose est l'ensemble des ĂȘtres vivants coexistant dans un espace dĂ©fini le biotope. L'Ă©tude des biocĂ©noses est faite par les Ă©cologues. Par exemple, l’évolution naturelle d’une tourbiĂšre est de cesser dans ĂȘtre une ; c’est l’extraction de la tourbe elle-mĂȘme qui permet son maintien. ProtĂ©ger la nature, c’est souvent maintenir des activitĂ©s, Ă©viter que des milieux se ferment » par boisement spontanĂ© entraĂźnant une moindre richesse de la faune et de la flore, restaurer des milieux Ă  grand renfort d’artifices contrats passĂ©s avec des agriculteurs, rĂ©glementations, introduction de brouteurs », replantation de vignes, restauration de zones humides favorables Ă  l’avifaune Ă  grand renfort de bulldozer –ex des Landes -, organisation d’espaces protĂ©gĂ©s relevant du pur artifice
etc.. Lorsqu’on rĂ©munĂšre des agriculteurs pour maintenir des pratiques favorables Ă  la protection de la nature et la qualitĂ© des eaux directive Habitats » de la CEE, nous sommes trĂšs loin de la protection d’une nature sauvage et extĂ©rieure
 La protection des paysages est aussi trĂšs significative Ă  ce sujet le paysage rĂ©sulte de l’interaction entre des processus naturels et des activitĂ©s humaines. Sur un arriĂšre-plan naturel, les sociĂ©tĂ©s humaines façonnent leurs territoires les modes d’occupation des sols, les diffĂ©rents systĂšmes de mise en valeur vont modifier la disposition des habitats et des infrastructures, la rĂ©partition des agro-systĂšmes, la physionomie des forĂȘts. En l’absence de mise en valeur, la nature reprendrait le dessus, mais pas de façon nĂ©cessairement profitable pour l’homme. Il est indispensable par consĂ©quent d’abandonner la conception moderne sĂ©paration de l’homme et de la nature et d’assumer le caractĂšre hybride des milieux, de penser l’insertion de l’homme dans la nature dans une perspective d’évolution permanente oĂč la nature n’est pas une identitĂ© fixe et immuable. Ce que nous sommes capables de faire pour des espaces particuliers Ă  protĂ©ger – comme s’ils devaient ĂȘtre distinguĂ©s d’autres espaces destinĂ©s aux activitĂ©s normales – doit ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă  tout espace. C’est la raison pour laquelle la notion de protection des paysages est particuliĂšrement pertinente puisque cette frontiĂšre disparaĂźt alors. 6 L’éthique de l’objectivitĂ© et le Contrat Naturel » Michel Serres Michel Serres entend par contrat naturel » celui qui lie entre eux les scientifiques autour de l’éthique de la production de la vĂ©ritĂ©. Entre la dictature du vrai d’essence platonicienne, et la quasi-disparition de l’objet mĂȘme la nature – que l’on pourrait appeler ici le socio-centrisme - derriĂšre les idĂ©ologies et les enjeux de pouvoir ou conflits d’intĂ©rĂȘts, les scientifiques doivent jouer un rĂŽle dĂ©terminant sur l’inscription dans le dĂ©bat public des certitudes, mais aussi des hypothĂšses et des nombreuses controverses autour de questions d’une grande complexitĂ© et qui ne permettent pas d’élaborer des scĂ©narios dans la certitude. Le noyau rationnel de ce contrat se trouve dans les rapports que les hommes entretiennent entre eux pour ĂȘtre porte-parole de la nature. Il incombe aux scientifiques de faire ainsi tĂ©moigner en personne » les choses, et de les porter sur la place publique, pour une juste apprĂ©ciation des risques. Nulle finalitĂ© transcendante ne doit prĂ©sider Ă  ces liens que les hommes doivent dĂ©sormais entretenir avec la nature mais ils sont seulement ceux du langage de la science, celui oĂč la Terre nous parle en termes de forces, de liens et d’interactions, et cela suffit Ă  faire un contrat ». Celui qui nous lie indissolublement Ă  la nature, au nom de cette conjonction de phĂ©nomĂšnes, certes dĂ©finalisĂ©e au sens de l’ architecture d’atomes » et de leurs mouvements appropriĂ©s » prĂ©sents dans la conception de la nature chez LucrĂšce, dans laquelle nous sommes insĂ©rĂ©s. Le naturalisme Ă©picurien, nous l’avons dĂ©jĂ  notĂ©, Ă©chappe aux deux critiques du finalisme et de l’anthropocentrisme, et permet de dĂ©passer la dualitĂ© moderne il faudrait montrer que le modĂšle spinoziste relĂšve de la mĂȘme orientation. 7 Patrimoine commun et transmission Les notions de bien commun et de patrimoine ont l’intĂ©rĂȘt de poser la nĂ©cessitĂ© de garantir l’accĂšs Ă  tous les ayant droit » Ă  un patrimoine commun que chaque gĂ©nĂ©ration doit s’efforcer de transmettre. Il s’agit d’une instance holiste » et collective, d’essence anti-individualiste au sens oĂč elle surplombe les individus. La transmission Ă©tant plutĂŽt solidaire d’une sociĂ©tĂ© de la tradition oĂč chaque gĂ©nĂ©ration hĂ©rite du devoir de maintenir le patrimoine dans l’état oĂč il doit le trouver. Cet enchaĂźnement gĂ©nĂ©rationnel est en principe mis en cause par l’affirmation individualiste. Rousseau ne disait-il pas qu’une gĂ©nĂ©ration ne peut assujettir Ă  ses lois les gĂ©nĂ©rations futures » ? Mais lorsque les spĂ©cialistes de l’environnement parlent de transmission, il s’agit d’une libertĂ© et non d’une contrainte pour les gĂ©nĂ©rations futures prĂ©server la libertĂ© de choix en prĂ©servant un patrimoine Ă  des usages non prĂ©visibles. 8 Anthropocentrisme et Ă©co-centrisme pas d’opposition irrĂ©ductible L’alerte Ă©cologique elle-mĂȘme ne peut que renvoyer Ă  un anthropocentrisme Ă©largi, au nom de la survie de l’humanitĂ©. Anticiper pour les gĂ©nĂ©rations futures et se prĂ©occuper de leur sort est aprĂšs tout un objectif anthropocentrique. Mais pour pouvoir le faire, il faut prĂ©alablement se situer dans son environnement, et commencer par penser comme une montagne » Aldo LĂ©opold, forestier et environnementaliste amĂ©ricain de la premiĂšre moitiĂ© du XXĂšme siĂšcle, Ă©ternel chasseur et pĂȘcheur, un des pĂšres fondateurs de l’écologie, dont la pensĂ©e est aujourd’hui reprise par un courant trĂšs significatif de l’écologie contemporaine. Ce dĂ©centrement, cette Ă©co-centration » permet aussi d’éviter l’heuristique de la peur » chĂšre Ă  Hans Jonas pour qui seul le spectre d’un scĂ©nario du malheur » peut donner une chance de ressaisissement » de la part de l’humanitĂ©. PlutĂŽt que ce pathos abstrait » se rĂ©fugiant dans le catastrophisme plutĂŽt que de se confronter concrĂštement Ă  notre rĂ©alitĂ© commune des liens qui nous unissent Ă  notre environnement, il s’agit d’articuler notre action technique dans le monde avec notre action Ă©thique. Notre action technique, qui consiste Ă  convertir plus de savoir – c’est-Ă -dire la connaissance que nous avons du monde - en plus de pouvoir, s’autorĂ©gule toute seule dans le cadre d’un processus illimitĂ© oĂč tout problĂšme nĂ© de la technique doit trouver une rĂ©ponse technique nous avançons tout droit. Agir Ă©thiquement consiste au contraire Ă  rĂ©gler notre conduite Ă  l’aide de la connaissance que nous avons de notre monde et notamment de notre connaissance Ă©cologique ; il s’agit d’une attitude prudente au sens aristotĂ©licien le chemin s’ouvre au fur et Ă  mesure que nous avançons, nous sommes amenĂ©s Ă  faire attention oĂč nous mettons les pieds, et de choisir des trajets non prĂ©vus au dĂ©part. Ces deux attitudes doivent ĂȘtre articulĂ©es. Nous devons passer de l’arrachement d’un sujet libre face Ă  une nature mĂ©canique, Ă  l’attachement, et ceci dans un double sens nous sommes de la nature, et nous Ă©prouvons un sentiment d’attachement Ă  la nature, ce qui signifie que nous y tenons », nous en avons souci. C’est une double appartenance qu’il s’agit ici d’affirmer l’ĂȘtre agissant appartient au milieu sur lequel il agit et qu’il fait sien. Cette relation, mĂȘme si elle n’a pas Ă©tĂ© reconnue pendant la pĂ©riode moderne, a toujours existĂ©. Mais il faut aujourd’hui l’actualiser, revendiquer cette parentĂ© des espĂšces vivantes, cette appartenance Ă  l’environnement ; mais aussi informer par les connaissances appropriĂ©es ce qui n’est d’abord qu’un sentiment. C’est ainsi que Baird Callicott philosophe amĂ©ricain contemporain spĂ©cialisĂ© sur les questions d’éthique de l’environnement explique l’éthique de LĂ©opold. Penser l’homme comme Ă©tant dans la nature et de la nature. DĂ©passement de la dualitĂ©. ArrĂȘtons-nous un instant sur nos premiĂšres dĂ©finitions si la nature est tout ce qui existe », et si nous faisons l’économie de ce principe organisateur » fortement teintĂ© de finalisme, il devient Ă©vident que l’homme mais aussi toutes ses activitĂ©s et toutes ses Ɠuvres, sont de et dans la nature. Philippe Descolat, anthropologue, soutient une idĂ©e voisine Par delĂ  nature et culture » l’ontologie occidentale a introduit cette rupture entre nature et culture qu’il s’agirait maintenant de relativiser, pour concevoir, sur un autre mode que ceux de la domination et de l’exploitation, l’interdĂ©pendance entre les humains et les non-humains, et intĂ©grer en quelque sorte dans une mĂȘme pensĂ©e anthropocentrisme et Ă©cocentrisme. Nous ne pouvons plus penser la nature comme dehors de l’humanitĂ© ». Cette crise Ă©cologique historique est peut-ĂȘtre l’occasion d’une nouvelle pensĂ©e de l’avenir de l’humanitĂ© dans le cadre Ă©largi de ses interactions et de sa coexistence pacifique entre humains, vivants, et non vivants. 1 Chaque entitĂ© vivante a-t-elle une valeur intrinsĂšque » ? Nous avons dĂ©jĂ  rencontrĂ© cette question. C’est en effet Rolston qui prĂ©tend Ă©tendre la morale kantienne Ă  toute forme de vie, chaque entitĂ© Ă©tant un centre tĂ©lĂ©onomique » ou fin en soi » en tant qu’elle vise Ă  se maintenir en vie. Il serait d’ailleurs plus pertinent de considĂ©rer l’ensemble de l’éco-systĂšme en tant que tout plutĂŽt que chacune des unitĂ©s prises isolĂ©ment
 Quoiqu’il en soit, il est ici important de rappeler qu’il n’y a pas de valeurs sans Ă©valuateur, et que la valeur qui est attribuĂ©e provient de l’homme en tant que celui-ci Ă©prouve un sentiment d’appartenance ou de parentĂ© avec l’ensemble des ĂȘtres de la nature. Le dĂ©saccord qui peut sĂ©parer les partisans et les dĂ©tracteurs d’une Ă©cologie Ă©co-centrĂ©e » est ainsi surmontĂ© le refus d’attribuer une valeur objective et absolue aux ĂȘtres vivants et non vivants ? au nom d’un finalisme naturel, ou de considĂ©rer que le bien est du cĂŽtĂ© de la nature, est tout Ă  fait conciliable avec la reconnaissance d’une valeur subjective accordĂ©e aux Ă©lĂ©ments de la nature en vertu de notre appartenance commune. La nature n’est ni bonne » ni mauvaise », elle n’a ni conscience, ni morale, ne se souci ni de nous, ni d’écologie » cf. Sponville, confĂ©rence Sortie Ouest, n’est surtout pas Dieu et ne doit pas ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme un ĂȘtre personnel ou panthĂ©iste Ă  qui nous pourrions assigner des fins ultimes. Nous ne devons ni dĂ©ifier, ni adorer, ni haĂŻr la nature, et la transformation de la nature par l’homme n’est pas un mal en soi, et mĂȘme parfois un grand bien. Cependant notre sort est organiquement liĂ© au sien, est la reconnaissance de cette parentĂ©, qui peut ĂȘtre le point de dĂ©part d’une nouvelle Ă©thique de rapprochement avec la nature et peut-ĂȘtre aussi d’une nouvelle esthĂ©tique, peut Ă  bon droit ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la manifestation d’une politique de civilisation », pour reprendre la formule de digne du plus grand intĂ©rĂȘt sur un plan anthropologique. Pour reprendre une notion stoĂŻcienne, l’oĂŻkopoiĂ©sis s’oppose Ă  l’autopoiĂ©sis, caractĂ©ristique du paradigme industriel moderne signifiant la capacitĂ© Ă  construire son propre monde en dehors de la nature. OĂŻkopoiĂ©sis action de s’approprier, de se concilier, de se rendre familier. L’homme peut vivre son rapport avec la nature sur ce mode de l’appropriation de soi comme faisant partie de l’univers. Nous pouvons alors rapprocher cette question de l’attribution de valeur Ă  notre environnement Ă  ce qu’affirme Spinoza concernant l’origine de la valeur nous ne dĂ©sirons pas une chose parce qu’elle est bonne. Elle est bonne parce que nous la dĂ©sirons. 2 Un nouveau naturalisme Il n’y a pas plus d’harmonie dans la nature que dans les sociĂ©tĂ©s humaines, mais inversement les perturbations anthropogĂšnes ne sont pas nĂ©cessairement dommageables. Mais nous n’avons pas la maĂźtrise ni sur la nature, ni sur la techno-nature que nous sommes en train de produire objets, produits, forces, fluides
 Cette perte de maintenance est prĂ©occupante. D’autre part, nos connaissances sur l’immensitĂ© du champ concernĂ© par notre environnement Ă  la fois naturel et social sont encore trĂšs insuffisantes pour que nous puissions Ă©valuer l’impact Ă  plus ou moins long terme de nos initiatives. Habiter une nature dont nous faisons partie, et qui comprend nos Ɠuvres, en faire une demeure qui soit viable et vivable, essayer de s’y comporter le moins stupidement possible, tel est la tĂąche qui est la nĂŽtre. Au lieu de centrer cette parentĂ© sur une humanitĂ© sĂ©parĂ©e de la nature par son rapport Ă  Dieu nous avons tendance Ă  sous-estimer l’influence du christianisme dans la modernité , nous renouons avec l’ancien naturalisme en tant que nous Ă©largissons cette parentĂ© Ă  l’ensemble des espĂšces. Naturalisme qui ne se veut plus anthropocentrique et finaliste comme chez Aristote, Platon, ou les stoĂŻciens, beaucoup plus proche en revanche du naturalisme d’Epicure et de LucrĂšce. Naturalisme Ă©largi qui s’étend Ă©galement Ă  l’ensemble des cultures et des productions humaines. Nous retrouvons Ă©galement Ă  travers cette nouvelle Ă©thique l’idĂ©e du bon usage » de la nature, depuis longtemps prĂ©conisĂ©e par exemple Colbert et sa politique d’exploitation des forĂȘts
. Nul besoin de dramatisation des rapports entre l’homme et la nature, de grand rĂ©cit promĂ©thĂ©en Ă  la gloire de l’industrie humaine, de recours au grand mythe du Paradis Perdu. Quoiqu’en disent les reprĂ©sentations de la modernitĂ© qui ont voulu longtemps nous faire croire Ă  la sĂ©paration de l’homme et de la nature, nous n’avons jamais cessĂ© d’en faire partie. Mais il s’agit de profiter de ce nouveau contexte historique de crise environnementale, pour cette fois-ci affirmer une valorisation consciente et assumĂ©e de notre appartenance Ă  la communautĂ© Ă©cologique. Daniel Mercier, le 02/11/2012
Etparfois mÃÂȘme, lorsque le ballon va pour rentrer dans la cage, au dernier moment il ralentit, s'arrÃÂȘte et repart en arriÚre. Pourquoi ? solution. Les manettes. Un électricien vient d'installer dans une usine, 2 grosses manettes cÎte à cÎte. Chaque manette peut ÃÂȘtre en position basse ou en position haute. Ces manettes devront ÃÂȘtre utilisées de la maniÚre
ï»żPubliĂ© le 11 aoĂ»t 2010 par la tite fĂ©e bleue Elle est parfois artificielle ou bien encore naturelle. Mais en l’accomplissant, on prend des risques importants. Qui est elle ?
Unechose est sĂ»re, c’est que l’intelligence artificielle s’immisce aujourd’hui dans de nombreux domaines artistiques contemporains : la musique, l’art pictural, l’écriture de fiction ou de scĂ©narios etc. Voyons maintenant quelques exemples. Depuis quelques annĂ©es, les projets et Ɠuvres artistiques commencent Ă  devenir
Compte tenu de la puissance colossale de notre technique dans ce domaine il devient d’une aveuglante clartĂ© que la prĂ©vention est la principale mission de la responsabilitĂ©. Mais ce n’est pas le seul domaine. Notre technique pacifique elle-mĂȘme, dont bĂ©nĂ©ficie quotidiennement l’humanitĂ© sur la planĂšte, recĂšle en elle un potentiel de malheur — qui, pour n’ĂȘtre ni intentionnel ni soudain, n’en est pas moins sournois. Il accompagne en consĂ©quence comme une ombre grandissante, les Ɠuvres que cette technique a voulues, et dont elle a eu si souvent besoin. Le choix plus simple qui consisterait Ă  suspendre toute action nous est ici refusĂ©, car nous devons poursuivre l’exploitation technique de la nature. Comment et dans quelles proportions, telles sont les deux seules questions qui subsistent; de mĂȘme, celle de savoir si nous sommes maĂźtres de la nature ou si nous pouvons le devenir est-elle l’une des questions les plus graves en ce qui concerne la libertĂ© humaine. Or tel est bien Ă©galement l’objet de mes rĂ©flexions aujourd’hui. Le danger qui nous menace actuellement vient-il encore du dehors ? Provient-il de l’élĂ©ment sauvage que nous devons maĂźtriser grĂące aux formations artificielles de la culture ? C’est encore parfois le cas, mais un flot nouveau et plus dangereux se dĂ©chaĂźne maintenant de l’intĂ©rieur mĂȘme et se prĂ©cipite, dĂ©truisant tout sur son passage, y compris la force dĂ©bordante de nos actions qui relĂšvent de la culture. C’est dĂ©sormais Ă  partir de nous que s’ouvrent les trouĂ©es et les brĂšches Ă  travers lesquelles notre poison se rĂ©pand sur le globe terrestre, transformant la nature tout entiĂšre en un cloaque pour l’homme. Ainsi les fronts se sont-ils inversĂ©s. Nous devons davantage protĂ©ger l’ocĂ©an contre nos actions que nous protĂ©ger de l’ocĂ©an. Nous sommes devenus un plus grand danger pour la nature que celle-ci ne l’était autrefois pour nous. Nous sommes devenus extrĂȘmement dangereux pour nous-mĂȘmes et ce, grĂące aux rĂ©alisations les plus dignes d’admiration que nous avons accomplies pour assurer la domination de l’homme sur les choses. C’est nous qui constituons le danger dont nous sommes actuellement cernĂ©s et contre lequel nous devons dĂ©sormais lutter. Il s’agit lĂ  de quelque chose de radicalement nouveau aucune des obligations que nous connaissons n’est jamais nĂ©e d’une impulsion salvatrice commune. Hans JONAS, “Technique, libertĂ©, obligation” in Une Ă©thique pour la nature 1987
Elledemande donc juste de disposer d’un minimum d’espace au sol pour la poser. 2. Le Zamioculcas zamiifolia. Originaire d’Afrique tropicale, et plus connue sous le nom de Zee Zee ou encore ÉternitĂ©, cette plante ne demande pas beaucoup de lumiĂšre ni d’entretien et accepte toutes sortes d’ambiances.
PubliĂ© le 10 juin 2022 Ă  9h30 TĂ©moignages 5 hommes nous racontent leur vraie vie sexuelle - ©Entertainment Pictures / Alamy / Abaca DĂ©sirs inattendus, fragilitĂ© cachĂ©e, questions inavouables
 ce n’est pas parce qu’on en parle souvent qu’on en parle vraiment. Cinq hommes nous racontent leur vĂ©ritable vie sexuelle. Par Nathalie Dupuis OĂč en sont les hommes avec leur pĂ©nis ? Les femmes questionnent leur vie sexuelle depuis toujours, et plus encore depuis le tsunami MeToo. Pourtant, le sujet de la sexualitĂ© masculine reste un mystĂšre planquĂ© sous un tapis de clichĂ©s. C’est sans doute la raison du succĂšs fulgurant du podcast de tĂ©moignages masculins On the Verge », lancĂ© par Anne-Laure Parmantier en 2019. Cette communicante, qui prĂŽne un fĂ©minisme paritaire et Ă©galitaire, a voulu leur permettre, Ă  eux aussi, de libĂ©rer leur parole. Ces derniĂšres annĂ©es, les femmes ont imposĂ©, Ă  juste titre, la rĂ©alitĂ© de leur sexualitĂ©. Je souhaitais apporter ma pierre Ă  cet Ă©difice en construction qu’est l’égalitĂ© hommes-femmes, en proposant un espace de discussion bienveillant, sans jugement, audible par tous et toutes. » À entendre les tĂ©moignages, il est Ă©vident qu’on ne parle pas sexualitĂ© de la mĂȘme maniĂšre entre hommes qu’entre femmes. On the Verge » est devenu un livre Ă©d. Robert Laffont, et l’occasion de revenir sur diffĂ©rents itinĂ©raires sexuels, d’aborder de maniĂšre trĂšs libre le polyamour autant que la masturbation prĂ©coce, l’impuissance, les relations queers, les problĂšmes d’érection. Un vĂ©ritable panorama de la sexualitĂ© masculine d’aujourd’hui. J’avais pu constater l’hypocrisie prĂ©gnante chez la plupart des hommes, qui ne se parlent pas entre eux sincĂšrement, ou alors uniquement Ă  travers le prisme de la performance, et vivent leur intimitĂ© et leur sexualitĂ© en projetant une image confiante et positive Ă  la sociĂ©tĂ©, au point qu’ils finissent par y croire eux-mĂȘmes, dit Anne-Laure Parmantier. Tout cela parce qu’il n’existe aucun espace pour se confier. » ©PresseÀ lire aussi >> TĂ©moignages en couple, elles cherchent des relations extra-conjugales sur les sites de rencontre Mais est-ce diffĂ©rent chez les femmes ? Oui, parce qu’il y a une vĂ©ritable sororitĂ©, surtout aprĂšs la premiĂšre grossesse, oĂč il devient naturel de se confier, en toute libertĂ©, et de se raconter les consĂ©quences sur la vie sexuelle. D’une façon gĂ©nĂ©rale, les filles, depuis qu’elles sont rĂ©glĂ©es, s’en parlent plus naturellement. » Alors oĂč en sont-ils, les hommes, avec leur vie sexuelle ? Pour la communicante, ceux qui la vivent de la maniĂšre la plus Ă©panouie, saine et rĂ©crĂ©ative sont ceux qui ont Ă©tĂ© accompagnĂ©s dans leur questionnement par leurs parents. Pour la plupart, et plus encore pour ceux de la nouvelle gĂ©nĂ©ration, la pornographie a Ă©tĂ© leur premiĂšre approche de la sexualitĂ©. Aujourd’hui, regarder un film porno est devenu facile d’accĂšs, alors qu’avant on se contentait d’une couverture de “Playboy” ou on tombait par hasard sur une VHS bien cachĂ©e ! Il ne faut pas l’interdire, mais il faut l’accompagner, poursuit Anne-Laure Parmantier. TrĂšs jeunes, les garçons sont confrontĂ©s Ă  des performances inatteignables pour le commun des mortels, et n’ont parfois que cela comme rĂ©fĂ©rence. Les rĂ©seaux ont changĂ© la rĂ©alitĂ© de la vie sexuelle. Les 20-25 ans font moins l’amour. Peut-ĂȘtre parce qu’ils sont saturĂ©s d’images ? Quant aux applications de rencontres, parfois, le seul fait de “matcher” suffit Ă  assouvir leurs fantasmes ou Ă  satisfaire leur ego, et ils ne donnent pas suite Ă  la rencontre. » Entre projections et rĂ©alitĂ©, nous avons eu aussi envie de recueillir la parole intime et sincĂšre d’hommes de tous les Ăąges. Cinq d’entre eux ont jouĂ© le jeu en toute libertĂ©. Je suis plus dĂ©contractĂ© » LĂ©onard, 51 ans J’ai mis du temps Ă  me l’avouer, mais je suis un Ă©jaculateur prĂ©coce, ce qui m’a longtemps complexĂ©. En vieillissant, je me suis rendu compte que je vivais ce truc avec plus de honte que les filles avec lesquelles je faisais l’amour, qui sont nettement plus indulgentes. Et comme une premiĂšre Ă©jaculation n’a pas vraiment d’incidence sur mon Ă©rection, je prolonge dĂ©sormais mes rapports en ayant deux, voire parfois trois Ă©jaculations lors du mĂȘme rapport. Depuis, je n’ai pas rĂ©glĂ© le problĂšme de fond, mais je suis nettement plus dĂ©contractĂ© ! » Elle ne portait pas de sous-vĂȘtements » Romain, 30 ans J’étais trop jeune quand le film est sorti, mais lorsque j’ai dĂ©couvert “Basic Instinct”, j’ai Ă©tĂ© trĂšs marquĂ© par la scĂšne oĂč Sharon Stone croise et dĂ©croise ses jambes. Jusqu’alors j’avais une sexualitĂ© classique, mais je suis devenu obsĂ©dĂ© Ă  l’idĂ©e de me balader avec une partenaire sans culotte. Étant en couple depuis deux ans, j’ai demandĂ© Ă  ma copine si elle Ă©tait d’accord pour ĂȘtre nue sous sa robe lorsqu’elle me retrouvait. La premiĂšre fois, c’était au cinĂ©ma. J’ai adorĂ©, quand elle s’est levĂ©e, ĂȘtre le seul Ă  savoir qu’elle ne portait pas de sous-vĂȘtements. Et dĂ©sormais, lorsque l’on est ensemble, cette seule idĂ©e m’excite. » Je voulais une union libre » Pierre, 49 ans J’ai toujours eu une vie sexuelle trĂšs active. J’ai Ă©tĂ© en couple pendant trois ans, et j’ai eu une petite fille, mais notre couple n’a pas durĂ©, car je voulais une union libre. Je voulais pouvoir faire l’amour avec d’autres, car je sĂ©parais l’amour et le sexe, mais la mĂšre de ma fille ne l’a pas compris. J’ai voulu ĂȘtre honnĂȘte avec elle, car mon bien-ĂȘtre passe par une libido Ă©panouie. Depuis cinq ans, j’ai une relation suivie avec une femme avec laquelle je ne vis pas. Qui, elle aussi, pratique l’amour libre. C’est un accord tacite entre nous, mais nous n’en parlons jamais, et l’idĂ©e que l’on ait des aventures sexuelles Ă  cĂŽtĂ© ajoute un sacrĂ© piment Ă  la nĂŽtre ! » J’ai appris Ă  la masturber » GrĂ©goire, 57 ans J’ai eu une opĂ©ration il y a cinq ans, suite Ă  une petite tumeur. Jusque-lĂ , j’avais une sexualitĂ© satisfaisante avec ma compagne, avec laquelle je vis depuis quinze ans. Nous faisions l’amour deux ou trois fois par semaine, et cela se passait trĂšs bien. À la clinique, le chirurgien m’a demandĂ© si nous souhaitions voir un psychologue. Sur le coup je n’ai pas compris pourquoi. C’est arrivĂ© aprĂšs. L’opĂ©ration a dĂ©rĂ©glĂ© ma libido. Pendant plus de deux ans, j’ai Ă©tĂ© incapable d’avoir une Ă©rection, malgrĂ© des piqĂ»res rĂ©guliĂšres chez un mĂ©decin
 Avec ma compagne, nous avons fait une ou deux tentatives qui se sont rĂ©vĂ©lĂ©es trĂšs dĂ©cevantes. Il m’était trĂšs difficile d’affronter ce problĂšme avec elle. Un soir, elle a fait une allusion, de maniĂšre subtile, me faisant comprendre qu’il Ă©tait douloureux pour elle de faire une croix sur sa sexualitĂ© elle a dix ans de moins que moi, mais qu’elle Ă©tait prĂȘte Ă  explorer d’autres maniĂšres de se faire plaisir. Un mois plus tard, un matin, j’ai recommencĂ© Ă  la caresser, et je l’ai laissĂ©e guider mes doigts. J’ai appris Ă  la masturber. Cela m’a redonnĂ© un certain pouvoir. Et d’une certaine façon, une forme de virilitĂ©. » Je fantasmais sur les hommes » Gustave, 35 ans J’ai toujours Ă©tĂ© attirĂ© par les garçons. Mais ma premiĂšre fois, c’était avec une fille Ă  l’ñge de 17 ans, et j’ai vĂ©cu une grande histoire avec une autre de 20 Ă  27 ans. On pratiquait une sexualitĂ© classique, qui m’allait trĂšs bien, mĂȘme si je n’étais pas complĂštement comblĂ©. À la fin de cette relation, je me suis autorisĂ© Ă  accepter mon homosexualitĂ©. TrĂšs bizarrement, je fantasmais sur les hommes, mais l’idĂ©e de l’acte sexuel me repoussait. J’avais la sensation que c’était plus “joli” avec une femme. Un soir, je suis tombĂ© sur un trĂšs beau garçon dans un bar, qui m’a proposĂ© de le suivre chez lui. Cela s’est fait beaucoup plus facilement que je ne l’imaginais. Depuis trois ans, je vis avec Max, qui a deux ans de plus que moi, nos rapports sexuels sont Ă  la fois trĂšs intenses et complices, c’est la clĂ© de notre histoire. » Apprendre Ă  faire l’amour » version mĂąle par DorothĂ©e Werner La parole des hommes sur leur sexualitĂ© se libĂšre-t-elle ? Parmi les quelques signes qui annoncent un changement, il y a Apprendre Ă  faire l’amour », le livre d’Alexandre Lacroix Allary Éditions. L’écrivain, philosophe et directeur de la rĂ©daction de Philosophie magazine » ne propose rien de moins qu’une rĂ©volution des clichĂ©s qui entravent et limitent nos sexualitĂ©s. Contrairement Ă  ce que laisse penser son titre, ce texte n’est pas un manuel technique de sexologie ou de psychologie du style le sexe pour les nuls », mais une tentative de donner une dĂ©finition, mieux, une description complĂšte de la bonne relation sexuelle, autrement dit du coup parfait ». Avec une telle affirmation c’est difficile, au dĂ©part, de ne pas flairer le coup marketing. Et pourtant non, le philosophe est dĂ©pourvu de tout cynisme. En don Juan socratique, ce pĂšre de cinq enfants, sans doute trĂšs amoureux des femmes, confesse parler Ă  partir de son expĂ©rience personnelle. Convoquant le ban et l’arriĂšre-ban de la philosophie, de Freud Ă  Foucault en passant par Bergson, Spinoza, Pascal ou Kant, il entend rĂ©enchanter aussi bien le sexe avec une personne aimĂ©e que le simple plan cul ». De brefs chapitres entrent dans les moindres dĂ©tails orgasme, positions, rythme, mots doux et mots crus, masturbation, sodomie, imperfection des corps, brutalitĂ©, domination masculine, commentaires pendant ou aprĂšs
 Le philosophe s’attelle Ă  dĂ©construire, dans les pas de nombreuses fĂ©ministes actuelles, le scĂ©nario jugĂ© trop normatif et Ă©triquĂ© prĂ©liminaires-pĂ©nĂ©tration-jouissance ». Il est question de la caresse chez Levinas, de la saisie chez Barthes, Leonard Cohen et Pierre Bourdieu, de la fixette fĂ©tichiste chez Annie Ernaux. La dĂ©monstration est Ă  la fois savante et trĂšs concrĂšte, sincĂšrement attachĂ©e Ă  dĂ©faire le mythe de la performance sexuelle obligatoire hĂ©ritĂ©e de la culture porno. Au final, c’est une ode pleine de vitalitĂ© Ă  la libertĂ© sexuelle, Ă  l’égalitĂ© et Ă  la fantaisie entre adultes consentants, sans excĂšs de morale ni dĂ©magogie avec l’air du temps. RĂ©jouissant sous une plume masculine. ©Presse
CrĂ©ation& intelligence artificielle ou la rĂ©volution des algorithmes intelligents. En matiĂšre d’innovation technologique, l’intelligence artificielle passionne autant qu’elle effraie. Alors que certains annoncent une rĂ©volution totale d’ici quelques dĂ©cennies, quel sera son impact sur la crĂ©ation artistique ?
LE PLAISIR DES LIVRES - Trois mĂ©decins signent Tout sur l’endomĂ©triose», un livre pratique, complet et parfaitement clair sur cette maladie qui touche, en France, 7 millions de femmes. Si vous souffrez pendant vos rĂšgles, et parfois au-delĂ , peut-ĂȘtre ĂȘtes-vous atteinte d’endomĂ©triose sans le savoir. En France, on peut estimer que 7 millions de femmes souffrent au cours de leurs rĂšgles, que 7,5 millions ont des douleurs au cours des rapports sexuels et que 2,4 millions se plaignent de douleurs gynĂ©cologiques quotidiennes», expliquent les trois auteurs de Tout sur l’endomĂ©triose. Odile Jacob Ce livre pratique, complet et parfaitement clair sur cette maladie est l’Ɠuvre des docteurs Delphine Lhuillery, mĂ©decin de la douleur, Érick Petit, radiologue, et Éric Sauvanet, chirurgien gynĂ©cologue-obstĂ©tricien. Trois compĂ©tences indispensables mais non suffisantes pour la prise en charge de cette maladie qui, explique Sophie, une patiente, agit sans pardon, tel un flĂ©au qu’il faut maintenant neutraliser». Sans que l’on sache trĂšs bien pourquoi, des cellules de l’endomĂštre intĂ©rieur de l’utĂ©rus s’installent dans la cavitĂ© abdominale et provoquent des douleurs lors des rĂšgles. En l’absence de traitement, elles ne cesseront qu’à la mĂ©nopause. Les auteurs expliquent l’importance du bilan initial, en dĂ©taillant les examens nĂ©cessaires et dans quel but on les propose. La moitiĂ© du livre est consacrĂ©e Ă  la prise en charge de la douleur par tous les moyens, mais les sujets tels que la sexualitĂ©, l’alimentation, le sport et les associations de patientes sont aussi abordĂ©s avec justesse. Salutaire, Ă  une Ă©poque oĂč certains mĂ©decins mal informĂ©s parlent encore si mal de la maladie. L’enfer», c’est le mot choisi par Amandine BĂ©got, la journaliste, Ă  qui un spĂ©cialiste» annonce Ă  32 ans, juste aprĂšs une Ă©chographie, qu’une intervention chirurgicale compliquĂ©e est Ă  prĂ©voir rapidement, avec probablement la pose d’une poche artificielle stomie encore appelĂ©e anus artificiel», NDLR pendant quelques semaines» en douchant ses projets de bĂ©bé».Une prise en charge adaptĂ©e Amandine est aujourd’hui sous pilule en permanence, elle n’a pas Ă©tĂ© opĂ©rĂ©e et son garçon soufflera sa quatriĂšme bougie cet Ă©tĂ©. Elle a eu la chance de consulter les trois auteurs et plaide dans la prĂ©face du livre pour que tous les mĂ©decins de France soient formĂ©s, sensibilisĂ©s Ă  ce flĂ©au» car, dit-elle, mon histoire ressemble Ă  mille autres». Si la maladie garde encore bien des mystĂšres, si elle se manifeste parfois trĂšs tĂŽt, on sait qu’une prise en charge adaptĂ©e l’opĂ©ration est parfois nĂ©cessaire peut en attĂ©nuer l’impact. Et, prĂ©cisent les auteurs, mĂȘme si vous continuez d’avoir mal, malgrĂ© la pilule ou l’opĂ©ration, vous n’ĂȘtes pas dĂ©munie pour autant, car il existe d’autres solutions pour vous aider Ă  soulager vos douleurs». Il n’est plus acceptable de s’entendre dire comme Christelle, lors de ses premiĂšres rĂšgles Ă  9 ans, que c’est normal d’avoir mal». Au point de ressentir des coups de poignard dans le ventre». Les lectrices et lecteurs! sont assurĂ©es d’avoir ici les connaissances les plus actualisĂ©es pour comprendre l’endomĂ©triose. MĂȘme le lancement de la cohorte ComPaRe EndomĂ©triose, par l’AP-HP en octobre 2018, pour impliquer les patientes qui le souhaitent dans la recherche y est Ă©voquĂ©. Un livre indispensable. Tout sur l’endomĂ©triose, soulager la douleur, soigner la maladie» de Delphine Lhuillery, Érick Petit, Éric Sauvanet, Éditions Odile Jacob, 2019, 278 pages, 23,90 €.
NoĂ«l c’est bien sĂ»r le PĂšre-NoĂ«l, ce sont des cadeaux pour tous, des bons repas en famille ou entre amis, des sourires et des surprises, et c’est aussi un beau sapin bien dĂ©corĂ©. Ici, je vous propose de dĂ©couvrir une sĂ©lection de ce qui se fait de mieux en terme de sapin artificiel. Il n’a peut-ĂȘtre pas le charme du sapin naturel, mais il a d’autres nombreux atouts.
Paris CollĂšge de France – Jeudi 29 mars 2018 Seul le prononcĂ© fait foi Madame la Ministre fĂ©dĂ©rale de l’Education et de la Recherche d’Allemagne, Monsieur le Commissaire europĂ©en, cher Carlos, Mesdames et Messieurs les Ministres, Monsieur le DĂ©putĂ© VILLANI, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Monsieur le Recteur de Paris, Monsieur l’administrateur du CollĂšge de France, Mesdames et Messieurs, Chers Amis, D’abord, je veux fĂ©liciter les organisateurs, je pense que venir parler d’intelligence et en particulier d’intelligence artificielle au CollĂšge de France n’est pas une mauvaise idĂ©e en soi et elle nous ramĂšne Ă  une histoire glorieuse de notre pays, Ă  des choix profonds qui ont d’ailleurs Ă©tĂ© de rassembler dans un traumatisme sur lequel il ne convient pas de revenir aujourd’hui quant Ă  la relation entre la France et son universitĂ© plus largement mais de rassembler les plus grands esprits dans un lieu et de chercher Ă  Ă©clairer plus largement. Ensuite, j’ai compris, Monsieur l’Administrateur gĂ©nĂ©ral, votre message, il convient que je reprenne Ă  la lettre les prĂ©conisations du lointain successeur de Claude BERNARD pour m’assurer que la stratĂ©gie sera ainsi grandement poursuivie, je n’en suis pas loin. Je veux en effet avant toute chose remercier les chercheurs Ă©minents qui ont acceptĂ© de venir pour certains dĂšs hier et tout au long de cette journĂ©e pour rĂ©flĂ©chir, universitaires, chercheurs, entrepreneurs, start-upers, au-delĂ  de toutes les barriĂšres sectorielles, de tous les clivages qui parfois existent, de toutes les diffĂ©rences de conditions pour partager la rĂ©flexion collective et de maniĂšre complĂštement coopĂ©rative aider Ă  construire cette stratĂ©gie. L’intelligence artificielle, je dois le dire, dit celui qui n’a qu’une formation philosophique et qui est donc toujours trĂšs admiratif devant les mathĂ©maticiens, les probabilistes et tous les grands scientifiques qu’il a devant lui, nous renvoie Ă  ce qui serait l’hypothĂšse leibnizienne selon laquelle il y a plusieurs mondes possibles. Il y a chez LEIBNIZ cette hypothĂšse que Dieu calcule pour nous le meilleur monde possible » et il y a donc quelque chose d’une option presque promĂ©thĂ©enne qui nous permet de revisiter la conception du monde de LEIBNIZ Ă  travers l’intelligence artificielle qui nous donnerait la capacitĂ© de rĂ©aliser nous-mĂȘmes ce calcul et Ă  travers en effet des machines apprenantes de pouvoir parcourir beaucoup plus rapidement les chemins du malheur pour choisir le bon chemin beaucoup plus tĂŽt et beaucoup plus rapidement. C’est promĂ©thĂ©en dans ce que cela comporte d’ambivalence, c’est une chance inouĂŻe d’accĂ©lĂ©rer le calcul rĂ©servĂ© Ă  Dieu chez LEIBNIZ, c’est une responsabilitĂ© Ă©norme d’avoir dans notre main cette possibilitĂ© de le faire. Au fond, c’est un peu de tout cela dont nous devons parler aujourd’hui et je crois un peu de cela dont vous avez largement parlĂ©. Nul n’a envie de se priver de cette facultĂ© mais chacun la considĂšre au moment oĂč elle lui est offerte avec un effroi lĂ©gitime et je dirai quiconque ne ressentirait pas une forme de peur ou ne redouterait pas cette possibilitĂ© pourrait lĂ©gitiment ĂȘtre jugĂ© inconscient. L’intelligence artificielle trouve son origine dĂšs le milieu du XXĂšme siĂšcle et l’explosion des puissances de calcul, la multiplication des volumes de donnĂ©es, l’essor rapide de nouveaux algorithmes ont fait entrer l’intelligence artificielle dans une nouvelle Ăšre qui est la fois une rĂ©volution technologique mais aussi Ă©conomique, sociale et bien Ă©videmment Ă©thique et donc une rĂ©volution politique au sens premier plus plein du terme si j’ose dire. Cette rĂ©volution ne se produira pas dans 50 ou 60 ans, elle est en train de se produire, des nouvelles opportunitĂ©s nous sont offertes, des choix sont dĂ©jĂ  devant nous de poursuivre ou non certains chemins d’innovation, de les encadrer, d’ouvrir ou non certaines possibilitĂ©s qui nous sont offertes. Donc, nous sommes dĂ©jĂ  dans cette nouvelle grammaire que je viens d’évoquer oĂč nous devons articuler la radicalitĂ© de choix et d’innovation profonde technologique, sociale, Ă©conomique et la responsabilitĂ© de choix Ă©thique. C’est pourquoi je veux remercier tout particuliĂšrement CĂ©dric VILLANI d’avoir rendu Ă  ce sujet un rapport extrĂȘmement Ă©clairant Ă  travers les 300 auditions qu’il a un instant rappelĂ©es, les rĂ©flexions prĂ©alables de France IA que je remercie, de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, de la CNIL, et par ce travail Ă  la fois de synthĂšse, d’auditions et d’invention parce que la rĂ©flexion en suppose, il a donnĂ© de l’intelligence artificielle une vision prĂ©cise, dĂ©barrassĂ©e de prĂ©jugĂ©s anxiogĂšnes mais responsable. Dans le dialogue qu’il a su mener dĂšs le dĂ©but avec les ministres, que je remercie non seulement pour leur prĂ©sence mais leur action dĂšs le dĂ©but de ce travail, il a permis de faire Ă©merger ces quelques lignes de force que je veux exposer devant vous aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’avoir une stratĂ©gie pensĂ©e d’en haut si je puis dire, venant d’en haut qui viendrait s’abattre sur ce qu’est l’intelligence artificielle. D’abord ce serait vain de vouloir le faire dans un seul pays et ensuite ce serait contraire Ă  la dynamique mĂȘme de ce qu’est l’intelligence artificielle dont l’une des forces est justement d’avoir donnĂ© le pouvoir aux multiples face Ă  l’un. Il nous faut donc penser la capacitĂ© Ă  en dĂ©finir les rĂšgles et la stratĂ©gie qui suppose un moment de synthĂšse et de dĂ©cision dĂ©mocratique dans ce mouvement perpĂ©tuellement pensĂ© par la multiplicitĂ© des acteurs et cette arborescence permanente qui passe par l’innovation de ce multiple. Autrement dit nous devons tenir d’une seule main - en mĂȘme temps, diraient certains - le progrĂšs technique et le progrĂšs humain, la transformation Ă©conomique et la transformation sociale et rĂ©ussir Ă  faire Ă  que cette utopie promĂ©thĂ©enne ne devienne pas une dystopie. Pour cela il nous faut d’abord ne pas cĂ©der Ă  ce qui a parfois Ă©tĂ© un tropisme europĂ©en et je dirai presque souvent un tropisme français qui est que la conscience parfaite et aigue de tous les effets non souhaitables d’une innovation puissent nous conduire la Ă  refuser de prime abord. Nous avons parfois ce dĂ©faut, nous l’avons eu dans notre vie industrielle ou d’innovation rĂ©cente, il ne faut pas y cĂ©der. Et donc je crois que la premiĂšre chose sur laquelle nous devons nous mettre d’accord cest qu’il ne faut pas avoir peur et refuser le changement. D’abord, parce qu’il est Ă  l’Ɠuvre partout et parce qu’il peut conduire aussi au meilleur et Ă  des innovations qui nous permettront de vivre mieux. Ensuite, il ne faut pour autant, c’est je crois le deuxiĂšme principe que nous devons nous fixer, ĂȘtre naĂŻfs et considĂ©rer que le changement, l’innovation technologique – qui est ce mouvement qu’on n’arrive pas toujours Ă  parfaitement synthĂ©tiser sur le plan conceptuel - portera en lui-mĂȘme les conditions de sa propre rĂ©gulation et donc sa bonne articulation avec le bien commun. Ca n’est pas vrai et nous vivons d’ailleurs dans un monde qui est plein des excĂšs liĂ©s aux externalitĂ©s nĂ©gatives des changements contemporains et Ă  l’incapacitĂ© que les acteurs multiples n’ont eu de penser leur propre rĂ©gulation, de penser si je puis dire le propre inhibiteur Ă  leur action parfois qui permet d’articuler les actions individuelles avec le bien commun. En la matiĂšr,e je ne crois pas totalement Ă  la parfaite composition des intĂ©rĂȘts individuels et Ă  la main invisible. Et donc il ne faut ni avoir peur ni ĂȘtre naĂŻf mais dĂ©finir ce chemin de crĂȘte qui nous permettra d'avoir une stratĂ©gie pour l'intelligence artificielle. Cette stratĂ©gie Ă  mes yeux passe par quatre Ă©lĂ©ments principaux qui procĂšdent largement du travail prĂ©sentĂ© par CĂ©dric VILLANI et de ce qu’ensemble vous avez conçu. Le premier, c’est de nous mettre en situation de construire ou je dirai plutĂŽt de conforter en France et en Europe l'Ă©cosystĂšme de l'intelligence artificielle et, en particulier en ce qui concerne les talents, un vĂ©ritable rĂ©seau de recherche et l'expĂ©rimentation. Le deuxiĂšme axe, c'est justement d'engager une politique rĂ©solue d'ouverture des donnĂ©es afin de favoriser l'Ă©mergence en France de champions de l’intelligence artificielle ou d’encourager leur dĂ©veloppement. Le troisiĂšme axe c’est d’avoir une stratĂ©gie Ă  la fois de financement, de projets -une stratĂ©gie publique française et europĂ©enne qui nous permette dans certains secteurs de dĂ©velopper et d'accĂ©lĂ©rer notre prĂ©sence et de rĂ©ussir pleinement dans la compĂ©tition internationale. De la santĂ© Ă  la mobilitĂ©, j'y reviendrai dans quelques instants. Et, enfin, c'est de penser les termes d'un dĂ©bat politique et Ă©thique que l'intelligence artificielle alimente partout dans le monde mais dont nous devons poser les termes car il nous faut articuler une rĂ©flexion, des rĂšgles et une comprĂ©hension commune. Le premier pilier de cette stratĂ©gie, donc, c'est cet Ă©cosystĂšme d'innovation dont nous avons absolument besoin. Plusieurs grandes disruptions technologiques ont ces derniĂšres annĂ©es en effet façonnĂ© le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui, en particulier la disruption numĂ©rique. Parfois la France a tardĂ© et, en la matiĂšre - et je dirai encore plus particuliĂšrement pour l'intelligence artificielle, le retard dans la construction ou le parachĂšvement d'un Ă©cosystĂšme adaptĂ©, c'est la certitude de manquer des opportunitĂ©s et c'est prendre le risque de dĂ©jĂ  perdre une bataille. Donc la capacitĂ© Ă  amĂ©liorer cet Ă©cosystĂšme, ce sont des opportunitĂ©s supplĂ©mentaires et ce sont plus de chances pour notre Ă©cosystĂšme de formation, de recherche et notre Ă©cosystĂšme Ă©conomique de rĂ©ussir. Nous avons des atouts pour rĂ©ussir dans l'intelligence artificielle. Je sais ĂȘtre critique sur notre pays quand il le faut et considĂ©rer en face nos propres handicaps, mais en la matiĂšre nous avons des atouts parce que nous avons d'ores et dĂ©jĂ  des talents, nous avons une excellence de la formation, en sciences de l'informatique, en mathĂ©matiques - notre rapporteur du jour ne dira pas le contraire - et nous avons des talents qui ont essaimĂ© et qui ont les uns et les autres plusieurs sont dans cette salle, en Europe comme au-delĂ  de l'Europe, construit l'excellence en la matiĂšre. Ce sont des chercheurs, des entrepreneurs français qui ont aidĂ© au pilotage automatique de nos avions, aux rĂ©alisations les plus parachevĂ©es des images synthĂ©tiques que nous pouvons voir ou aux thĂ©ories les plus avancĂ©es qui ont permis la technologie des effets spĂ©ciaux. Ces talents nous les avons, cet Ă©cosystĂšme est lĂ . Il a d’ailleurs convaincu certains qui le connaissaient bien de revenir ou d'investir en France ces derniĂšres annĂ©es, je pense en particulier Ă  FACEBOOK, GOOGLE, SAMSUNG, DEEPMIND, je remercie pour leur confiance parce qu'ils ont permis de fertiliser cet Ă©cosystĂšme. C'est Ă  cette excellence que nous devons les annonces d'implantations de ce jour, les centres de recherche de SAMSUNG, FUJITSU, IBM, DEEPMIND venant rejoindre ceux de GOOGLE ou FACEBOOK vont contribuer Ă  crĂ©er en France un maillage de compĂ©tences, de laboratoires, d'expĂ©rimentations au meilleur niveau mondial, ce qui est un atout formidable. Cet atout, c’est l'intelligence française dans ces secteurs qui en est le responsable et c'est la capacitĂ© des dirigeants de laboratoires, d'Ă©coles, d’universitĂ©, d'organismes qui a permis durant ces derniĂšres gĂ©nĂ©rations de le consolider et de ça je vous remercie profondĂ©ment. Maintenant, j’entendais les inquiĂ©tudes exprimĂ©es par certains qui sont dans cette salle avec qui j'ai discutĂ© informellement hier qui est de dire on arrive mĂȘme presque Ă  un point oĂč notre capacitĂ© Ă  former et garder dans cet Ă©cosystĂšme public français les talents est Ă  risque et donc nous devons entendre ce message et prendre nos responsabilitĂ©s pour que cet Ă©cosystĂšme puisse continuer Ă  se dĂ©velopper et accĂ©lĂ©rer sa croissance sans ĂȘtre fragilisĂ©, c’est pourquoi il nous faut prendre quelques dĂ©cisions. La premiĂšre, c’est que nous allons mettre en place un programme national pour l'intelligence artificielle. Il sera coordonnĂ© par INRIA en lien avec les autres organismes de recherche partenaires et les universitĂ©s liĂ©es et il impliquera l'ensemble de la communautĂ© scientifique française. Nous mettrons en place en particulier un rĂ©seau emblĂ©matique de quatre ou cinq instituts dĂ©diĂ©s ancrĂ©s dans des pĂŽles universitaires Ă©maillant le territoire français. Ces pĂŽles existent pour certains d'ores et dĂ©jĂ , nous ne partons pas de rien. Initiative PRAIRIE » Ă  Paris, Ă  Saclay avec l'institut DATA IA et le projet DIGIHALL, et nous allons en dĂ©velopper en partenariat pour avoir justement ce rĂ©seau, cette communautĂ© trĂšs ouverte mais qui aura une interaction permanente et qui permettra d'amplifier, de consolider rapidement d'autres nƓuds du futur rĂ©seau Ă  Toulouse, Ă  Grenoble et dans dautres sites. Ce rĂ©seau connectĂ© Ă  l'Ă©cosystĂšme français de recherche universitaire sera le vaisseau amiral de la recherche publique française en matiĂšre d'intelligence artificielle et un Ă©lĂ©ment essentiel dans la formation de nouveaux talents. Il aura vocation Ă  accueillir des financements privĂ©s - je sais combien la ministre veille justement Ă  ce bon partenariat et Ă  ces Ă©quilibres - et je veux ici saluer les partenaires industriels qui ont d'ores et dĂ©jĂ  souhaitĂ© s'y associer. Ce qui permettra de crĂ©er au-delĂ  de ce qui existe aujourd'hui des chaires d'excellence qui nous permettront aussi de faire venir pour un temps de leur carriĂšre ou de maniĂšre plus stable les meilleurs chercheurs ou chercheurs-entrepreneurs du monde en la matiĂšre pour qu'ils viennent s'installer un temps en France. Je souhaite en particulier que ces projets soient tournĂ©s vers nos partenaires europĂ©ens et en premier lieu vers l'Allemagne, c'est pourquoi une part des financements sera dĂšs l'origine flĂ©chĂ©e vers des projets franco-allemands. Nous devons Ă©galement faire un effort tout particulier sur la formation. Il nous revient en effet de veiller Ă  ce que l'universitĂ© française fournisse Ă  ce domaine de recherche les compĂ©tences nĂ©cessaires Ă  la croissance de l'Ă©cosystĂšme. Le premier enjeu de l'intelligence artificielle Ă  l'Ă©chelle mondiale ce sera celui des talents, c'est dĂ©jĂ  celui des talents. Nous avons une attractivitĂ© par notre excellence parce que nous sommes moins chers que beaucoup d'autres mais le risque est qu'il y ait un assĂšchement rapide de ce vivier que plusieurs d'entre vous ont pointĂ©. Si notre systĂšme d'enseignement supĂ©rieur ne sait pas former et attirer assez de techniciens, d'ingĂ©nieurs, de docteurs pour alimenter le dĂ©veloppement des laboratoires et des entreprises en France, pour garder aussi ses talents dans la formation des nouvelles gĂ©nĂ©rations , nous ne parviendrons pas Ă  consolider cette conquĂȘte d'un horizon nouveau. C’est pourquoi nous doublerons le nombre d'Ă©tudiants formĂ©s Ă  l'intelligence artificielle, depuis la licence jusqu'au doctorat en passant par les formations professionnelles courtes, et prĂ©voirons les financements qui correspondent Ă  ce doublement. La France, pour tenir son rang, devra Ă©galement rayonner au plan international. Je viens de l'Ă©voquer, c'est la nĂ©cessitĂ© d'avoir des chaires individuelles pour attirer les meilleurs chercheurs. Ce sera, aussi, la mise en place d'une sĂ©rie d'appels Ă  projets sur le mode de ce que nous avons fait avec Make our planet great again » autour de cette initiative consolidĂ©e par le CNRS qui a permis Ă  travers des appels Ă  projets de sĂ©lectionner les meilleurs projets mondiaux et de financer de maniĂšre diffĂ©rentielle les meilleures recherches en la matiĂšre et donc attirer les meilleurs enseignants, enseignants-chercheurs pour une part de leur carriĂšre ou pour une annĂ©e, d’attirer les meilleurs projets de recherche Ă  travers ces sĂ©lections pour faire justement de la France un lieu d'attractivitĂ© et de compĂ©titivitĂ© internationale en la matiĂšre. L’excellence de notre recherche sera le terreau de nos champions industriels futurs. Pour cela, nous devons augmenter drastiquement la porositĂ© entre la recherche publique, indispensable, et le monde industriel - peut-ĂȘtre encore plus dans le domaine de l'intelligence artificielle que dans d'autres, ce que nous avons connu durant les gĂ©nĂ©rations prĂ©cĂ©dentes d'innovations. Et, c’est pourquoi, nous porterons dans la loi PACTE Ă  venir et que portera le ministre de l'Economie et des Finances une rĂ©forme, travaillĂ©e de prĂšs avec la ministre de la Recherche, qui supprimera le passage obligatoire auprĂšs de la commission de dĂ©ontologie ou qui autorisera un chercheur public Ă  consacrer jusqu'Ă  la moitiĂ© de son temps Ă  une entitĂ© privĂ©e, alors qu'aujourd'hui c'est plafonnĂ© Ă  20 %. Ce qui a conduit, et j'en ai eu la dĂ©monstration ces derniers jours dans les discussions que j'ai pu avoir avec les uns et les autres, beaucoup trop de chercheurs Ă  aller rejoindre des universitĂ©s anglo-saxonnes qui leur permettaient cette souplesse - en m’expliquant que c'Ă©tait prĂ©cisĂ©ment pour cette souplesse qu'ils faisaient un tel choix. C’est dans cette fertilisation croisĂ©e que nous construirons un vĂ©ritable Ă©cosystĂšme de recherche et c'est parce que nous arriverons Ă  construire ce va-et-vient, parce que nous crĂ©erons aussi un Ă©cosystĂšme oĂč les entrepreneurs se considĂšreront comme toujours liĂ©s Ă  l'universitĂ© et Ă  l'organisme de recherche - parce qu'ils sont un peu les dĂ©biteurs moraux si je puis dire ou parce qu’on leur permet cette souplesse - que nous serons sĂ»rs que nos organismes de recherche, que notre formation garde cette excellence et cette capacitĂ© d'attraction. Je souhaite Ă©galement, et c'est absolument clĂ© pour que cet Ă©cosystĂšme de l'intelligence artificielle soit pleinement adaptĂ© Ă  nos dĂ©fis contemporains, qu'on donne plus de place Ă  l'expĂ©rimentation. Vous l'avez rappelĂ©, Monsieur le DĂ©putĂ©, et je le dis ici trĂšs clairement, nous avons besoin aujourd'hui d'amĂ©liorer notre rapiditĂ© dans les dĂ©lais, les autorisations en matiĂšre d'expĂ©rimentation si nous voulons dĂ©velopper jusqu'au bout nos propres innovations ou les favoriser. Le temps aujourd’hui nĂ©cessaire pour tester une innovation en France, qu’il s’agisse d’un algorithme et de ses effets finaux sur tel ou tel dĂ©bouchĂ©, ou d’un mĂ©dicament, il n’est pas toujours et tout Ă  fait celui d’une Ă©conomie d’innovation. Je sais combien la ministre des SolidaritĂ©s et de la SantĂ© est Ă©galement attachĂ©e Ă  ce sujet. Je souhaite donc que nous puissions, Ă  court terme, relancer d’ici l’étĂ© un appel Ă  expĂ©rimentation, afin d’introduire par amendements dans la loi Pacte des modifications lĂ©gislatives autorisant les expĂ©rimentations les plus significatives. Je souhaite donc que, dans chaque secteur liĂ© Ă  l’intelligence artificielle, si des Ă©volutions, des amĂ©liorations des dispositifs d’expĂ©rimentation sont souhaitĂ©es et relĂšvent de dispositions lĂ©gislatives, nous puissions les examiner pour les modifier Ă  l’étĂ©, comme nous allons le faire sur certains secteurs sur lesquels je reviendrai dans quelques instants. Au-delĂ , nous rĂ©formerons fondamentalement le programme France ExpĂ©rimentation – Monsieur le SecrĂ©taire d’Etat au NumĂ©rique – qui doit devenir Ă  la fois permanent et ancrĂ© dans les missions de chaque ministĂšre. Cette capacitĂ© justement Ă  diffuser l’expĂ©rimentation, l’innovation au cƓur mĂȘme de l’action de l’Etat est un Ă©lĂ©ment essentiel pour rĂ©ussir ce pari de l’intelligence artificielle, qui est d’abord et avant tout, un pari sur l’intelligence humaine, la capacitĂ© Ă  former, Ă  faire de la Recherche, Ă  aller plus vite fans celle-ci, Ă  pouvoir expĂ©rimenter beaucoup plus rapidement. C’est en crĂ©ant cette matrice puissante que nous serons en mesure d’entrer dans la compĂ©tition mondiale oĂč les Anglo-Saxons et les Chinois ont dĂ©jĂ  investi massivement. Cette avance n’est en rien une fatalitĂ© si nous arrivons Ă  dĂ©velopper cet Ă©cosystĂšme en France comme en Europe, et c’est ce mĂȘme combat de transformation de cet Ă©cosystĂšme que je souhaite mener dans le cadre du prochain budget, comme dans le cadre des discussions en cours au niveau europĂ©en. Le deuxiĂšme chantier qui doit ĂȘtre le nĂŽtre, c’est celui des donnĂ©es. Vous en avez rappelĂ© toute l’importance Ă  l’instant, le commissaire aussi, et c’est un atout de la France. Nous avons des bases de donnĂ©es centralisĂ©es massives, qui nous offrent l’opportunitĂ© de nous positionner Ă  la pointe de l’intelligence artificielle dans certains secteurs. Beaucoup reprochent parfois Ă  la France d’ĂȘtre un Etat jacobin, cela a des avantages, c’est que c’est organisĂ©, c’est structurĂ© et, dans ces moments-lĂ , cela peut ĂȘtre une chance. Il faut donc savoir l’utiliser. Pour permettre que soient exploitĂ©es au mieux les donnĂ©es, nous allons mĂ©thodiquement mais rĂ©solument procĂ©der Ă  une ouverture proactive de nos donnĂ©es. Cela passe d’abord et avant tout par l’ouverture des donnĂ©es publiques. Nous continuerons de renforcer et d’élargir le service public de la donnĂ©e, c'est-Ă -dire la liste des bases publiques ouvertes et maintenues avec un trĂšs haut niveau de qualitĂ©, de fraĂźcheur de la donnĂ©e et de disponibilitĂ© des services. Les lois sont passĂ©es dans le quinquennat prĂ©cĂ©dent qui ont dĂ©fini le cadre ; il faut maintenant passer aux travaux pratiques, et le secrĂ©taire d’Etat, dans les prochains mois, continuera, en lien avec chacun des dĂ©partements ministĂ©riels, Ă  ouvrir justement ces donnĂ©es publiques et Ă  en dĂ©finir le cadre explicite. Nous ouvrirons Ă©galement les donnĂ©es financĂ©es sur fonds publics. En particulier les donnĂ©es de santĂ©, mais aussi les donnĂ©es des opĂ©rateurs de transport, Ă  des fins de Recherche et d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, ou encore par dĂ©faut les donnĂ©es issues des projets de Recherche, financĂ©s par l’Etat, par exemple dans la cadre du plan Open Science », portĂ© par la ministre FrĂ©dĂ©rique VIDAL. C’est lĂ  aussi une maniĂšre, sur la base de donnĂ©es qui sont consolidĂ©es par des programmes financĂ©s par le public, de crĂ©er un cadre qui permet une accĂ©lĂ©ration, justement, de nos innovations et de l’avancĂ©e en matiĂšre d’intelligence artificielle. Enfin, nous faciliterons la crĂ©ation de plates-formes de partage de donnĂ©es entre acteurs publics et privĂ©s, avec une logique sectorielle. Il faut en effet que les acteurs Ă©conomiques eux-mĂȘmes aillent plus loin dans leur pratique de partage et de valorisation de leurs donnĂ©es. A l’image des rĂ©seaux, la valeur des jeux de donnĂ©es croĂźt plus que proportionnellement, on le sait, Ă  leur taille ; il faut donc qu’on arrive Ă  convaincre et Ă  crĂ©er le cadre dans plusieurs secteurs d’ouvrir les donnĂ©es entre les acteurs qui peuvent ĂȘtre en compĂ©tition, mais dont la coopĂ©ration en matiĂšre d’ouverture peut permettre des innovations, une amĂ©lioration de leur productivitĂ©, de leur business models », des innovations profondĂ©ment radicales, s’ils acceptent d’avoir une logique coopĂ©rative sur la base de ces plates-formes. En matiĂšre agricole par exemple, pour ne prendre qu’un secteur trĂšs concret, nous pouvons faire beaucoup mieux, avoir des innovations, on le sait, de rupture, on a commencĂ© Ă  le faire dans certains sous-secteurs si nous arrivons Ă  ouvrir les donnĂ©es entre des PME qui sont aujourd’hui dissĂ©minĂ©es, Ă  partager la donnĂ©e, Ă  mieux modĂ©liser et Ă  faire fonctionner des modĂšles d’intelligence artificielle qui permettront d’aller beaucoup plus loin et de faire mieux. Nous ferons donc Ɠuvre de pĂ©dagogie et de soutien Ă  toutes les initiatives privĂ©es d’ouverture et d’échange pour que naissent, dans tous les secteurs, une Ă©conomie ouverte de la Data. Du secteur bancaire, pour les donnĂ©es de transaction, Ă  l’agriculture, pour l’efficacitĂ© des pesticides, en passant par les donnĂ©es de tests de vĂ©hicules autonomes, c’est Ă  une mobilisation gĂ©nĂ©rale autour de la donnĂ©e que j’appelle aujourd’hui. Ce travail sera accompagnĂ© aussi par cette culture de l’ouverture, la promotion des logiciels libres, partout oĂč nous pouvons dĂ©velopper ces derniers. CorrĂ©lativement, je souhaite enfin que nous puissions ouvrir une rĂ©flexion Ă  l’échelle europĂ©enne sur l’accĂšs, Ă  des fins d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, aux bases massives de donnĂ©es privĂ©es, notamment cette des trĂšs grands acteurs qui se trouvent en monopole de fait sur la collecte de certaines catĂ©gories de donnĂ©es. Parce que c’est une rente de situation que nous avons consolidĂ©e dans certains secteurs qui crĂ©e une rente au carrĂ© » si je puis dire, de consolidation des donnĂ©es, et il nous faut pouvoir l’ouvrir, parce que ces donnĂ©es ont une part de biens collectifs dont il faut que, Ă  la fois la Recherche mais l’ensemble des consĂ©quences et des innovations subsĂ©quentes puissent ĂȘtre partagĂ©es par l’ensemble de la population europĂ©enne. Cette politique d’ouverture des donnĂ©es est Ă©videmment inconcevable sans un cadre europĂ©en protĂ©geant les donnĂ©es personnelles et permettant la pleine valorisation de ces donnĂ©es Ă  l’échelle europĂ©enne et pour l’espace europĂ©en. Les dĂ©boires rĂ©cents de plusieurs rĂ©seaux sociaux ont montrĂ© combien l’opinion publique et les usagers deviennent sensibles Ă  l’utilisation qui est faite de leurs donnĂ©es personnelles. C’est absolument lĂ©gitime. Parce que nous sommes Ă  un moment de changement – il s’agit ici de ne stigmatiser ou de ne juger personne – mais on voit bien que, y compris dans les sociĂ©tĂ©s qui sont attachĂ©es avant tout Ă  la libertĂ© et qui peuvent accepter des choses que des prĂ©fĂ©rences collectives europĂ©ennes auraient refusĂ©es depuis longtemps, y compris dans ces sociĂ©tĂ©s-lĂ , le rapport Ă  la protection des donnĂ©es individuelles, au secret, est en train de se poser. Donc, en mĂȘme temps que nous ouvrons les donnĂ©es dans le cadre que j’évoquais, nous avons besoin d’en penser le cadre. Un des dĂ©fis de l’intelligence artificielle est prĂ©cisĂ©ment d’abord et avant tout de ne pas confondre l’usage de donnĂ©es agrĂ©gĂ©es et l’intrusion dans les donnĂ©es personnelles. Cela suppose une rĂ©glementation trĂšs prĂ©cise qui, sans empĂȘcher les Ă©volutions scientifiques – nous l’avons vu ce matin en matiĂšre mĂ©dicale, on peut avoir Ă©normĂ©ment de donnĂ©es utiles sur le plan mĂ©dical –prĂ©serve l’anonymat et ce qui relĂšve du secret de l’individu. Ce qui peut donner le meilleur, sur le plan d’une innovation mĂ©dicale qu’on a vu ce matin, peut donner le pire si l’anonymat n'est pas prĂ©servĂ©, et ça devient un instrument de sĂ©lection, des contrats d’assurance aujourd’hui, de l’accĂšs Ă  l’éducation ou Ă  l’emploi demain ! Et donc ce cadre-lĂ , nous devons le penser au niveau europĂ©en. Le rĂšglement gĂ©nĂ©ral sur la protection des donnĂ©es, qui entrera en vigueur en mai prochain, que vous avez Ă©voquĂ©, Monsieur le Commissaire, correspond Ă  cette prĂ©occupation. Et je veux ici saluer en effet l’immense travail qui a Ă©tĂ© fait. Mais nous devons aller plus loin. Parce que nous jouons lĂ  une grande part de l’avenir mĂȘme de l’intelligence artificielle. Au bout du bout, c’est du contrĂŽle de notre propre vie, de nos choix implicites et explicites que nous parlons. Et je le dis ici, la voix europĂ©enne qui postule que chacun doit pouvoir rester maĂźtre de ses donnĂ©es est la bonne, est la seule qui puisse rendre acceptable pour nos concitoyens un dĂ©veloppement rĂ©el de l’intelligence artificielle. C’est dans ce cadre que nous devons construire les prochaines Ă©tapes d’une rĂ©glementation qui permettra d’ouvrir, en assurant la protection de chacun individu, la maĂźtrise des donnĂ©es. Et aprĂšs, ce sera un sujet au dĂ©tail, innovation par innovation, pratique par pratique pour que cet usage soit sincĂšre, et permette Ă  l’ensemble des industriels, des innovateurs de se dĂ©velopper pleinement dans un cadre qui est transparent, loyal pour chaque citoyen. Mais nous devons aussi construire, en mĂȘme temps que nous ouvrons justement ces donnĂ©es, le cadre d’une souverainetĂ© europĂ©enne. OĂč seront processĂ©es » ces donnĂ©es ? Qui sont les acteurs qui les utiliseront ? Est-ce que la rĂ©glementation Ă  laquelle ils se rĂ©fĂšrent sera une rĂ©glementation sur laquelle nous avons pris le pas ? Ce sont des vrais sujets qui vont se poser, qui se posent d’ores et dĂ©jĂ  aujourd’hui. Et au cƓur desquels se pose la construction d’une souverainetĂ© numĂ©rique europĂ©enne. C’est cela, la clĂ©. En matiĂšre de fiscalitĂ©, en matiĂšre de rĂ©gulation, en matiĂšre de droit, et donc en matiĂšre d’acteurs, alors mĂȘme que la Recherche est toujours mondiale et parfaitement immĂ©diate, ses traductions Ă©conomiques et financiĂšres impliquent toujours de revenir Ă  un moment donnĂ© Ă  une forme de territorialisation. Et c’est cela ce que nous sommes en train, sans d’ailleurs nous le dire et sans avoir suffisamment tirĂ© une pensĂ©e holistique en la matiĂšre, nous devons rĂ©agrĂ©ger aujourd’hui. Nous l’abordons de maniĂšre spĂ©cifique Ă  chaque fois, selon qu’on parle de la fiscalitĂ© des GAFA, comme on dit, ou de la rĂ©gulation des donnĂ©es individuelles ou de telle autre ou telle autre. Mais le vrai cadre est plus large ! C’est que des acteurs mondiaux ont Ă©mergĂ© parce que leur business Ă©tait mondial. Et il est mondial. Mais les consĂ©quences restent nationales ou europĂ©ennes, pour ce qui nous concerne. Et donc le cadre doit aussi pouvoir ĂȘtre national, europĂ©en ! Et la rĂ©gulation qu’on y met, en particulier sur les donnĂ©es, doit pouvoir ĂȘtre nationale et europĂ©enne. Et, donc, c'est cela qu’il nous faut inventer dans les prochains mois et prochaines annĂ©es, et vous voyez en ce titre que la stratĂ©gie que je prĂ©sente aujourd’hui a l’humilitĂ© de souligner elle-mĂȘme qu’elle a une part d’inachevĂ©, parce que la France ne peut seule poursuivre ce chemin ; mais je veux dire quel est l’esprit que je poursuivrai dans les dĂ©bats europĂ©ens. Si je ne devais illustrer qu’un atout sectoriel de la France en matiĂšre de donnĂ©es, et donc d’intelligence artificielle, ce serait justement celui de la santĂ©. Dans le domaine de la santĂ©, nous savons que le diagnostic mĂ©dical, les protocoles de soin, la mĂ©decine prĂ©dictive et prĂ©ventive sont en train de vivre des Ă©volutions absolument radicales. Nous sommes en train, grĂące Ă  l’intelligence artificielle, d’aller vers des innovations qui permettront en effet de prĂ©venir des pathologies, et donc d’en rĂ©duire le coĂ»t complet de maniĂšre drastique, qui vont aller vers de la mĂ©decine individuelle qui permettra lĂ  aussi de rĂ©duire les coĂ»ts, d'amĂ©liorer notre condition de vie, notre longĂ©vitĂ©, et la qualitĂ© de la vie ! Donc, cette transformation est absolument radicale et elle va toucher tous les secteurs de la mĂ©decine. Et les exemples sont trop nombreux pour ĂȘtre citĂ©s. Nous en avons vu ce matin Ă  l'institut Curie quelques-uns, de la dĂ©tection prĂ©coce de tumeur Ă  la prĂ©vention des rĂ©cidives, la thĂ©rapie gĂ©nique ou l'immunothĂ©rapie, de l'identification des pathologies jusque-lĂ  considĂ©rĂ©es comme indĂ©tectables, Ă  la dĂ©couverte de fonctionnements molĂ©culaires inconnus, l'intelligence artificielle ne vient pas se substituer Ă  toutes les innovations faites dans chacun de ces domaines, mais elle permet des sauts radicaux et elle permet trĂšs clairement d'aller dans la direction de l'individualisation et d’une mĂ©decine plus prĂ©dictive, comme je l'Ă©voquais. Elle est donc capable d'apporter des usages thĂ©rapeutiques et des bien-ĂȘtre au patient, fondamentaux. Comme je l'Ă©voquais, en la matiĂšre, nous avons un vĂ©ritable avantage, c'est que nous possĂ©dons un systĂšme de santĂ©, Madame la Ministre, trĂšs centralisĂ©, avec des bases de donnĂ©es d'une richesse exceptionnelle, notamment celle de l'Assurance-maladie et des hĂŽpitaux. Elles sont parmi les plus importantes au monde et mettent Ă  notre portĂ©e des dĂ©couvertes scientifiques majeures. Nous l'avons vu ce matin Ă  l'institut Curie. D'ores et dĂ©jĂ , l'intelligence artificielle permet de mieux dĂ©celer des pathologies, de mieux traiter, nous l'avons vu, telle ou telle tumeur, de mieux dĂ©celer des arythmies cardiaques, d'assister de maniĂšre profonde des radiologues dans leurs travaux et de rĂ©duire les erreurs mĂ©dicales profondĂ©ment humaines qui, certes, sont trĂšs minoritaires mais existent encore. L'intelligence artificielle ne se substituera pas, ni aux mĂ©decins, ni aux chercheurs, mais elle permet ce passage Ă  l'Ă©chelle. C'est pourquoi nous devons tirer pleinement partie de notre avance en la matiĂšre. C'est pourquoi je veux que nous allions encore plus loin, afin de tirer tout le parti possible des donnĂ©es Ă  la disposition de la Recherche. Nous avons créé, en 2017, l'Institut National des DonnĂ©es de SantĂ©, qui gĂšre l'accĂšs Ă  la base de donnĂ©es de l'Assurance-maladie dans des conditions trĂšs protectrices pour l'anonymat et la sĂ©curitĂ© des donnĂ©es des patients. Et qui est totalement en conformitĂ© avec l'esprit que je viens d'Ă©voquer Je souhaite que nous puissions crĂ©er, sur cette base, un vĂ©ritable hub des donnĂ©es de santĂ©, structure partenariale entre producteurs et utilisateurs des donnĂ©es, qui pilotera l'enrichissement continu mais aussi la valorisation du systĂšme national de donnĂ©es de santĂ©, pour y inclure, Ă  terme, l'ensemble des donnĂ©es remboursĂ©es par l'Assurance-maladie, en ajoutant les donnĂ©es cliniques des hĂŽpitaux, les donnĂ©es de la mĂ©decine de ville, ainsi que les donnĂ©es de grande qualitĂ©, scientifique et mĂ©dicale, créées dans le cadre de cohortes nationales. Ce hub des donnĂ©es de santĂ© nous permettra, dans un cadre parfaitement sĂ©curisĂ©, garantissant l'anonymat et le respect de chaque individu d'avoir un espace de travail pour l'intelligence artificielle qui permettra d'accĂ©lĂ©rer les innovations que j'Ă©voquais il y a un instant. L'ensemble des organismes de Recherche français y auront leur part. J'Ă©voquais tout Ă  l'heure l’INRIA, le CNRS, il est Ă©vident que l'INSERM aura une part essentielle dans ce travail, et l'Institut National des DonnĂ©es de SantĂ© continuera d'ĂȘtre le garant du respect des rĂšgles d'accĂšs aux donnĂ©es de santĂ©, parce que ces progrĂšs n'auront pas lieu si nous ne sommes pas capables de garantir aux Français la confidentialitĂ© complĂšte de leurs donnĂ©es individuelles. En chaĂźnant et en enrichissant les informations, en travaillant sur de trĂšs larges volumes de donnĂ©es, en accĂ©lĂ©rant leur ouverture Ă  des fins de Recherche, j'en suis convaincu, nous inventerons la mĂ©decine de demain, ici en France. Et je souhaite, Ă  cet Ă©gard, que l'infrastructure que nous mettrons en place soit en mesure de garantir Ă  notre pays un juste retour Ă©conomique et industriel, comme je l’évoquais, et ça relĂšve de cette souverainetĂ© que je mentionnais tout Ă  l'heure, et il est important aussi que dans les critĂšres d'ouverture, nous ayons la possibilitĂ© d'avoir les innovations qui se dĂ©ploient en France et en Europe sur le plan industriel, d'avoir aussi la crĂ©ation de valeurs qui se fait lĂ  ; sinon, il y aurait une aberration Ă  dire Ă  nos concitoyens nous avons une ressource formidable, elle va aider la Recherche », trĂšs bien, mais elle va permettre de dĂ©velopper des acteurs extraordinaires qui vont crĂ©er des emplois, mais essentiellement Ă  l'autre bout du monde ». Il faut que lĂ , nous ayons un principe de rĂ©alitĂ© aussi, et c'est l'approche de souverainetĂ© que j'Ă©voquais, sur le plan Ă©conomique, social qui est indispensable. Ce dĂ©fi est donc Ă  notre portĂ©e et je souhaite trĂšs profondĂ©ment que nous puissions le conduire dans les prochains mois. Nous sommes en effet Ă  l'aube d'Ă©volutions profondes, et nous voyons que la dimension technologique doit ĂȘtre soutenue par un cadre rĂ©glementaire incitatif adaptĂ©. Ce qui confĂšre au gouvernement, Ă©videmment, un rĂŽle accru dans ces rĂ©volutions technologiques, et je suis, Ă  ce titre, dĂ©terminĂ© Ă  ne pas freiner ces progrĂšs scientifiques par une anticipation et une adaptation insuffisantes de la rĂ©glementation et de la rĂ©gulation. C'est le pire des risques. Et donc au contraire, je souhaite que l'Etat puisse intervenir, en soutien rĂ©solu aux acteurs de cette transformation, mais en en pensant le cadre, en le concevant et en organisant – j'y reviendrai dans quelques instants – les conditions d'un dĂ©bat en permanence transparent et dĂ©mocratique sur toutes les consĂ©quences qui en dĂ©coulent. Donc, nous allons Ă  la fois ouvrir nos donnĂ©es et les diffĂ©rents secteurs Ă  l'intelligence artificielle, et nous allons ouvrir notre sociĂ©tĂ© – qui adore cela – Ă  toutes les controverses liĂ©es Ă  l'intelligence artificielle. Le troisiĂšme pilier de notre action, c'est Ă©videmment le cadre rĂ©glementaire et financier, national et europĂ©en. Le cadre rĂ©glementaire d'abord, c'est que, au-delĂ  de, justement ces ouvertures de donnĂ©es, il nous faut absolument crĂ©er les conditions d'Ă©mergence de ces plates-formes transverses ; j'Ă©voquais la santĂ© Ă  l'instant, c'est aussi le cas de l'Ă©nergie, de la dĂ©fense, des mobilitĂ©s de la finance, de l'aĂ©ronautique. LĂ  aussi, il nous faudra adapter le cadre rĂ©glementaire en France, comme au niveau de l'Union europĂ©enne pour permettre l'Ă©mergence de ces plates-formes et accĂ©lĂ©rer justement leur dĂ©veloppement, tout en pensant les rĂšgles et leur rĂ©gulation. A ce titre, je veux prendre un exemple, expliquer en quoi l'Etat peut justement sur ce cadre rĂ©gulatoire, pleinement accompagner l’innovation. C'est l'exemple de la voiture autonome. Il faut reconnaĂźtre que, jusqu'alors, la France avait collectivement peinĂ© Ă  se positionner parmi les leaders en matiĂšre d'expĂ©rimentation et de dĂ©veloppement de la voiture autonome, et je considĂšre que c'est une bataille essentielle de combler ce retard. La France est une grande nation automobile, nous y avons notre rĂŽle historique. Nous avons perdu d'ailleurs largement, au profit de notre voisin allemand qui, au tournant des annĂ©es 1980, a fait des choix technologiques et de positionnement de gammes plus pertinents que nous, ce leadership. Nous pouvons le retrouver par le vĂ©hicule autonome et la capacitĂ© Ă  en penser justement le cadre ; parce que la valeur va se redĂ©ployer diffĂ©remment ! Elle va se dĂ©ployer de la voiture elle-mĂȘme et de la partie mĂ©canique, vers la partie logicielle et l'intelligence des mobilitĂ©s. C'est pourquoi nous publierons, courant avril, notre stratĂ©gie française pour le vĂ©hicule autonome, portĂ© par Anne-Marie IDRAC, que je remercie, avec l'ambition de positionner la France Ă  la pointe de l'expĂ©rimentation et de l’industrialisation du vĂ©hicule autonome. DĂšs le dĂ©but de l'annĂ©e prochaine, nous disposerons du cadre lĂ©gislatif autorisant les expĂ©rimentations de niveau 4 qui sera inclus dans la loi Pacte. D'ici 2022, un cadre de rĂ©gulation permettant la circulation des vĂ©hicules autonomes sera mis en place. En bout de chaĂźne, j'ai la volontĂ© de poser au plus vite le cadre d'homologation des vĂ©hicules autonomes, en mobilisant Ă  la fois la puissance publique et le secteur privĂ©. Parce que prĂ©cisĂ©ment, ce mouvement des vĂ©hicules autonomes exige une courbe d'apprentissage, nous financerons un programme national d'expĂ©rimentation en impliquant les territoires, les constructeurs et les Ă©quipementiers. Et donc nous aurons trĂšs rapidement des expĂ©rimentations sur des territoires, qui seront volontaires, en en dĂ©finissant le cadre juridique d'exception, et je souhaite que nous puissions mettre autour de la table l’ensemble de ces acteurs nationaux pour travailler sur des sujets que sont, justement, les bases de donnĂ©es de tests, la cartographie. Nous avons, en la matiĂšre, une stratĂ©gie française qui va donc se dĂ©ployer, mais qui doit trĂšs rapidement devenir une stratĂ©gie franco-allemande et une stratĂ©gie europĂ©enne. Et lĂ -dessus, le choix, il est dans la main de nos pays. Si nous faisons comme nous avons fait il y a vingt ans, la France et l'Allemagne se diviseront et elles se battront en Europe pour pousser des standards divergents. Les gagnants seront chinois et amĂ©ricains, et dans l'intelligence artificielle, il ne faut pas ĂȘtre grand clerc pour le savoir. Soit nous dĂ©cidons ensemble – ce qui sera mon souhait – de pousser des standards communs et de dĂ©finir ensemble des standards, des acteurs communs pour dĂ©finir une vraie cartographie, pour dĂ©finir les vraies rĂšgles et la vraie crĂ©ation de valeur. En tout cas c'est, moi, ce que je proposerai de maniĂšre rĂ©solue. Au niveau europĂ©en, ce sont ces rĂšgles nouvelles qu'il nous faut crĂ©er et ce cadre de dĂ©ploiement, c'est pour moi au cƓur de cette stratĂ©gie numĂ©rique que nous devons avoir, qui ne doit pas se contenter simplement d'une ouverture de nos frontiĂšres et de la crĂ©ation d'un marchĂ© domestique Ă  27, mais bien de la dĂ©finition de standards communs Ă  27, et de la capacitĂ© Ă  crĂ©er la normalisation europĂ©enne qui nous convient ! Parce que c'est le seul moyen de dĂ©finir vraiment nos choix collectifs. Nous l’avons fait, dans d'autres moments de notre histoire, il faut le faire aujourd'hui ! Sinon nous subirons soit les choix collectifs faits par des acteurs privĂ©s, dominants – et c'est tout leur mĂ©rite – outre-Atlantique ; soit par des acteurs publics dominants asiatiques, qui sont en train de s'organiser pour le faire. Et donc, si nous voulons garder l'Ă©quilibre europĂ©en et la capacitĂ© Ă  rĂ©guler qui est la nĂŽtre, il faut absolument construire ce cadre de rĂ©gulation. En matiĂšre de financement, nous devons aussi avoir une approche volontariste. L'intelligence artificielle sera le premier champ d'application du Fonds pour l'Innovation et l'Industrie de 10 milliards d'euros, mis en place en dĂ©but d'annĂ©e. Sur les revenus de ce Fonds, copilotĂ© par le ministre de l'Economie et des Finances, et la ministre de l'Enseignement supĂ©rieur, de la Recherche et de l'Innovation, nous isolerons dĂšs les prochains mois, 100 millions d'euros destinĂ©s Ă  l'amorçage et la croissance de nos start-up en intelligence artificielle. Au-delĂ , il consacrera 70 millions d'euros par an, via la Banque Publique d'Investissement, Ă  l'Ă©mergence de start-up dites deep technology » dans notre pays. Des financements du Programme d'investissement d'avenir et du Fonds pour l’Innovation et l’indusitre, Ă  hauteur de 400 millions d'euros, seront consacrĂ©s au financement des dĂ©fis d'innovation, Ă  la fois amont et aval, ou Ă  des projets industriels dĂ©diĂ©s Ă  l'intelligence artificielle. Au total, ce sera un effort dĂ©diĂ© de 1,5 milliard d'euros d’argent public, entraĂźnant directement plus de 500 millions d'euros d'investissements privĂ©s supplĂ©mentaires, qui sera mis en Ɠuvre pour accompagner l'Ă©mergence de ce grand pĂŽle mondial de l'intelligence artificielle. La clĂ©, au-delĂ  de ces choix assumĂ©s de politiques publiques, c'est Ă©videmment que ces choix et que la visibilitĂ© soient donnĂ©s trĂšs tĂŽt Ă  la Recherche publique et partenariale, qu'elle puisse ainsi dĂ©clencher les choix de Recherche collaborative et d'investissements privĂ©s, pour avoir l'effet de dĂ©multiplication, derriĂšre ces investissements et ces choix publics. J'ajoute Ă  cet effort prĂšs de 800 millions d'euros que l'Etat investira d'ici 2024 dans la nanoĂ©lectronique, ingrĂ©dient essentiel au dĂ©veloppement de l'intelligence artificielle ; je sais combien plusieurs dans cette salle sont attachĂ©s Ă  cet Ă©cosystĂšme. Au-delĂ  de ces choix français, c'est le prochain cadre financier europĂ©en qui devra porter cette ambition de l'intelligence artificielle, et Monsieur le Commissaire, vous savez que la France sera en soutien de vos propositions. Je considĂšre que nous avons besoin d'un budget europĂ©en qui prĂ©serve toute l'ambition de ces politiques historiques, qu'il s'agisse de la PAC ou des fonds structurels, mais qui porte une ambition nouvelle en particulier en matiĂšre d'innovation et d'innovation de rupture. C’est pourquoi j’ai, dĂšs le discours prononcĂ© Ă  la Sorbonne, proposĂ© que nous mettions en place une DARPA ou l’équivalent d’une DARPA europĂ©enne et que j’ai soutenu le rapport que vous avez prĂ©sentĂ© il y a quelques mois maintenant, en dĂ©but d’annĂ©e, qui propose justement des financements de l’innovation de rupture au niveau europĂ©en, la simplification des programmes de recherche europĂ©ens en termes administratifs. Autant de mesures en termes d’ambition, d’organisation que la France soutiendra pleinement parce qu’ils sont la condition de possibilitĂ© de l’émergence de cet Ă©cosystĂšme et de la rĂ©ussite de ces transformations que j’évoquais. Au-delĂ  de cela, Ă©videmment, l’Etat dĂ©finit le cadre rĂ©glementaire, finance, et l’Europe avec lui. L’Etat doit lui-mĂȘme s’adapter dans son organisation, dans ses politiques publiques pour tirer parti de ce que l’intelligence artificielle prĂ©sente et propose en termes d’éducation, de formation, de politique de l’emploi. La rĂ©volution devant laquelle nous sommes, c’est celle qui va permettre, par l’intelligence artificielle, par des modĂšles plus prĂ©dictifs, d’amĂ©liorer le rapprochement entre l’offre et la demande, d’amĂ©liorer le systĂšme de formation et l’adaptation de celui-ci, d’individualiser la capacitĂ© Ă  former et donc de permettre, par nos politiques publiques, de rĂ©gler une partie des externalitĂ©s nĂ©gatives des disruptions technologiques et c’est cela dont nous avons besoin. Si nous voulons convaincre nos concitoyens que ces disruptions technologiques ne sont pas vecteur que d’un changement nĂ©gatif et ne doivent pas nourrir que la peur, nous devons rĂ©ussir Ă  montrer par ces mĂȘmes innovations qu’elles gĂ©nĂšrent un bien-ĂȘtre pour eux quant Ă  ces problĂšmes qu’elles ont engendrĂ©s. Aussi longtemps que nous ne verrons que les innovations technologiques qui dĂ©truisent des emplois dans les secteurs traditionnels localisĂ©s sur le terrain, ce sera une source d’effroi. Si nous arrivons, par l’intelligence artificielle et avec ces mĂȘmes acteurs et les start-up qui en Ă©mergent, Ă  montrer que nous savons trĂšs rapidement prĂ©voir les destructions d’emplois Ă  venir dans telle ou telle rĂ©gion, mais aussi celles qui vont Ă©merger compte tenu des qualitĂ©s et des qualifications prĂ©sentes dans cette rĂ©gion, et rĂ©orienter notre systĂšme de formation et de formation continue, individualiser la formation pour permettre de retourner vers l’emploi – dispositifs qui existent d’ores et dĂ©jĂ  technologiquement, il faut les dĂ©ployer et les traduire dans nos politiques publiques –, nous changerons totalement le regard sur ces innovations, nous changerons totalement le rapport, la relation, l’expĂ©rience qui est faite par nos concitoyens avec l’intelligence artificielle. Donc, c’est aussi cela le dĂ©fi qui est posĂ© Ă  l’Etat et qui est absolument indispensable dans les domaines que je viens d’évoquer et c’est cette dynamique que nous continuerons Ă  dĂ©cliner et que le secrĂ©taire d’Etat, Mounir MAHJOUBI, justement, prĂ©cisera avec une mobilisation nationale et une stratĂ©gie justement politique publique par politique publique pour en tirer toutes les consĂ©quences. Enfin le quatriĂšme pilier de cette stratĂ©gie, c’est Ă©videmment de dĂ©finir les enjeux Ă©thiques et politiques de l’intelligence artificielle. J’ai amplement parlĂ© des innovations formidables que promet l’intelligence artificielle, du soutien massif que la France et, j’espĂšre, l’Europe, seront rĂ©solues Ă  lui apporter et Ă  quel point c’est un enjeu Ă©conomique, scientifique, social essentiel. Mais une intelligence artificielle n’est rien d’autre que le projet qu’elle sert, dans les conditions dĂ©finies par ceux qui l’ont programmĂ©e, sur la base des donnĂ©es qui lui ont Ă©tĂ© fournies et ces trois conditions dessinent, by design, si j’osais devant vous, le modĂšle d’intelligence artificielle que nous voulons voir exister ou plutĂŽt et beaucoup plus simplement celle du modĂšle de sociĂ©tĂ© que nous voulons. Et en la matiĂšre, rien ne serait pire que de laisser ces choix Ă  des entreprises privĂ©es ou Ă  des systĂšmes autocratiques. Et donc, quand on parle d’éthique et de choix politique sur l’intelligence artificielle, c’est justement de considĂ©rer qu’il y a un implicite derriĂšre cette aventure qui est la nĂ©cessitĂ© de procĂ©der Ă  des choix profonds. Comme je l’évoquais avec quelques-uns d’entre vous hier, nous avons Ă  mes yeux trois dĂ©fis qui sont extrĂȘmement classiques lorsque des innovations de ce type apparaissent ou des grandes rĂ©volutions adviennent nous avons un choix en termes de conflit entre les valeurs et la technique, nous avons une tension Ă©thique sur le plan gĂ©ographique et nous avons une tension temporelle. Nous nous retrouvons dans un systĂšme et une grammaire qui nous sont familiers Ă  ce titre et c’est cela qu’il nous faut penser. Le choix entre valeur et technique, c’est qu’aussi longtemps que la technique sert le bien commun, il y a peu de conflits. Les innovations de santĂ© que j’évoquais, une start-up qui va permettre cette mĂ©decine prĂ©dictive individuelle, il n’y aura pas de sujet. La tension Ă©thique et le rapport Ă  nos valeurs adviennent le jour oĂč les acteurs qui l’utilisent ne respectent pas les valeurs collectives ou les prĂ©fĂ©rences collectives qui sont les nĂŽtres. Et donc, permettre Ă  une start-up d’utiliser les donnĂ©es françaises pour permettre justement des innovations, une amĂ©lioration des patients français, tout le monde sera d’accord. Mais le jour oĂč cette start-up est basĂ©e dans un pays qui ne respecte pas ou ne regarde pas et ne se considĂšre pas comme obligĂ©e ni par le droit français ni par le droit europĂ©en et a des prĂ©fĂ©rences collectives qui sont profondĂ©ment diffĂ©rentes, nous aurons un problĂšme. Donc ce sujet, c’est que prĂ©existent Ă  ces choix techniques des choix en termes de valeur qu’il va nous falloir poser et constamment suivre. Ces valeurs sont celles que nous avons dĂ©jĂ  commencĂ© Ă  explorer dans nos dĂ©bats contemporains le respect de la libertĂ© individuelle, le respect de l’intimitĂ© et de ce qui relĂšve justement de notre propre vie privĂ©e. Mais il y aura d’autres sujets de valeur qui seront posĂ©s oĂč des prĂ©fĂ©rences auront Ă  s’exprimer et ceci devra ĂȘtre discutĂ© pour en dĂ©finir le cadre. Il nous faut garder la confiance dĂ©mocratique de cette innovation, c’est la clĂ©. Et donc nous aurons des dĂ©bats de valeur sur ce sujet pour savoir oĂč sont nos prĂ©fĂ©rences et quelle est notre capacitĂ© Ă  articuler la technique avec ces prĂ©fĂ©rences, mais il nous faut aussi s’assurer que ces Ă©volutions techniques ne viennent jamais corrompre la confiance dĂ©mocratique parce que le jour oĂč un prĂ©sident de la RĂ©publique ne pourra plus expliquer Ă  ses concitoyens les consĂ©quences d’une innovation qu’il aura permise, nous aurons un problĂšme de confiance dĂ©mocratique parce que les concitoyens diront Mais alors, qui dĂ©cide ? Ça n’est donc plus vous, ce ne sont donc plus les gens que nous Ă©lisons dĂ©mocratiquement. » Pour ce faire, il nous faudra mettre Ă  la fois de la transparence et de la loyautĂ© dans le systĂšme. De la transparence, c’est-Ă -dire que la clĂ© est de mettre partout de la transparence publique sur les algorithmes, rendre les algorithmes publics, s’assurer qu’ils sont utilisĂ©s en transparence, traquer leurs biais, ne pas leur confier le monopole de la dĂ©cision, s’engager Ă  les enrichir ou les complĂ©ter par la dĂ©cision humaine. C’est tout cela que nous devons faire dans les prochains mois et prochaines annĂ©es. Cette transparence, elle suppose une interaction permanente entre l’intelligence artificielle et l’humain et les choix qui seront faits, elle des dĂ©bats permanents, des corrections, elle suppose qu’à partir du moment oĂč on va mettre l’entrĂ©e Ă  l’universitĂ©, l’entrĂ©e dans une profession ou une formation derriĂšre un algorithme, la nĂ©cessitĂ© de rendre plus dĂ©mocratique cet algorithme et donc de s’assurer de sa loyautĂ©, de s’assurer de sa transparence complĂšte et qu’il puisse y avoir un dĂ©bat sur ces rĂšgles sinon nous dĂ©lĂ©guons Ă  l’algorithme le choix entre des prioritĂ©s dĂ©mocratiques. C’est pourquoi je souhaite que ce sujet soit au cƓur de la recherche menĂ©e dans le cadre du programme coordonnĂ© par INRIA. Je suis tout Ă  fait favorable Ă  l’idĂ©e d’avoir un laboratoire ouvert en la matiĂšre et qu’il y ait, d’ailleurs, dans le croisement et l’interdisciplinaritĂ© des sciences humaines et de l’intelligence artificielle et de toutes les sciences dures mobilisĂ©es, la possibilitĂ© de confronter justement une rĂ©flexion sur l’éthique de l’usage, de progressivement construire les codes Ă©thiques qui accompagneront ces usages indispensables. Et au cƓur de cette rĂ©flexion, nous devons inscrire des engagements de non-discrimination sociale, ethnique, sexuelle et l’Etat, pour ce qui le concerne, rendra donc par dĂ©faut public le code de tous les algorithmes qu’il serait amenĂ© Ă  utiliser au premier rang desquels, Madame la Ministre, celui de Parcoursup, parce que je pense que c’est une pratique dĂ©mocratique. Je vois qu’il y a des gens qui ont dĂ©posĂ© les dossiers dĂ©but mars, qui sont en attente des rĂ©ponses et qui veulent d’ores et dĂ©jĂ  essayer de voir l’intimitĂ© de l’algorithme pour dĂ©jouer Ă©ventuellement toutes les stratĂ©gies. Plus sĂ©rieusement, je pense que c’est essentiel et cela suppose donc un dialogue permanent lĂ  aussi, mais qui est au cƓur de ces innovations. Plus largement encore, je souhaite que soit engagĂ©e une rĂ©flexion europĂ©enne et internationale sur le contrĂŽle et la certification des algorithmes afin que l’Europe soit cet espace de libertĂ© et de progrĂšs rĂ©sistant Ă  la fois la privatisation opaque de l’intelligence artificielle ou Ă  son usage potentiellement despotique si on le laisse se concentrer dans des mains publiques qui relĂšvent de choix collectifs qui ne sont pas forcĂ©ment les nĂŽtres pour parler en pĂ©riphrases. C’est aussi un sujet que je veux discuter, au-delĂ  du cadre europĂ©en, au niveau international et en particulier avec nos amis canadiens que je sais trĂšs engagĂ©s sur le sujet. Nous aurons l’occasion dĂ©but avril d’avoir cet Ă©change et je souhaite que nous puissions aller jusqu’à crĂ©er un GIEC de l’intelligence artificielle, c’est-Ă -dire vĂ©ritablement de crĂ©er une expertise mondiale indĂ©pendante qui puisse mesurer, organiser le dĂ©bat collectif et dĂ©mocratique sur les Ă©volutions scientifiques de maniĂšre totalement autonome, de maniĂšre totalement indĂ©pendante et de nourrir le dĂ©bat dĂ©mocratique dont nous aurons besoin parce que l’un des sujets clĂ©s qui se feront jour et qui existent dĂ©jĂ , ce sera l’indĂ©pendance de la recherche et, justement, de la discussion qui aura cours autour non seulement des algorithmes, mais de toutes les rĂ©flexions autour de l’intelligence artificielle. Je crois donc qu’il revient aux Etats, aux puissances publiques d’investir en la matiĂšre et de garantir le cadre mondial de cette indĂ©pendance Ă  travers ce GIEC de l’intelligence artificielle. C’est une responsabilitĂ© morale, c’est aussi la garantie que nos dĂ©mocraties ne succomberont pas en quelque sorte Ă  un syndrome orwellien oĂč la technologie n’est plus un instrument de libertĂ©, mais une forme d’instance de contrĂŽle et cela suppose aussi toute l’interdisciplinaritĂ© que j’évoquais. Articuler ces valeurs et ces choix techniques, c’est aussi acter que nous avons besoin, dĂšs l’éducation et tout au long de l’éducation, de mettre justement en Ɠuvre ces choix de valeurs et de les rendre transparents et d’avoir dans nos formations, dans notre Ă©ducation aussi le souci qu’il n’y ait pas une capture de ces innovations radicales et de cette intelligence artificielle par quelques-uns parce qu’aujourd’hui, le monde dans lequel on vit est un monde de superstars – c’est vrai pour le numĂ©rique mais c’est encore plus vrai pour l’intelligence artificielle – oĂč quelques-uns et c’est leur mĂ©rite et j’ai Ă©normĂ©ment de respect pour eux parce que c’est le fruit d’une intelligence, d’un travail, parfois de chance mais c’est lĂ , mais il y a une hyperconcentration non seulement de la valeur créée, mais aussi de choix profonds qui ne sont pas que des choix entrepreneuriaux, qui sont des choix de sociĂ©tĂ© et peut-ĂȘtre de civilisation. C’est pour ça que j’en appelle Ă  cette rĂ©gulation, c’est pour ça qu’on a besoin de dĂ©finir ces rĂšgles Ă©thiques. Mais donc ça suppose aussi qu’on n’ait pas trop de ressemblances dans les acteurs qui sont Ă  mĂȘme de faire ces choix. Et donc il ne faut pas que les acteurs de l’intelligence artificielle soient par trop un peu ce que je suis devant vous, c’est-Ă -dire des mĂąles blancs quadragĂ©naires - il en faut et je ne vais pas scier la branche sur laquelle je suis assise n’ayant pu changer de condition - mais je constate que dans ce secteur, il y a beaucoup de mĂąles blancs quadragĂ©naires formĂ©s essentiellement dans les grandes universitĂ©s amĂ©ricaines ou europĂ©ennes. Nous devons donc mobiliser davantage de formations scientifiques pour aller chercher justement plus de femmes, d’aller chercher aussi plus d’égalitĂ©, plus de diversitĂ© sociale. Je pense que dans le pari qui est le nĂŽtre, il y a la nĂ©cessitĂ© d’avoir une inclusivitĂ© dans ces formations parce qu’on le voit bien, ce sont des mĂ©tiers critiques oĂč des choix profonds sont aussi faits par les acteurs de chaque jour. Et donc, dans les stratĂ©gies que nous devons dĂ©velopper, nous devons veiller Ă  ce qu’il n’y ait pas une concentration justement des talents, une concentration dans la main de quelques-uns. Enfin nous avons Ă  gĂ©rer, je le disais, la tension Ă  la gĂ©ographie et au temps. La tension Ă  la gĂ©ographie, comme je l’ai illustrĂ© Ă  plusieurs reprises dans des cours, ce phĂ©nomĂšne est mondial. La recherche est par dĂ©finition mondiale et elle doit absolument le rester. Les acteurs Ă©conomiques sont devenus mondiaux avec une vraie concentration justement et parfois des situations de fait monopolistique. Or, les prĂ©fĂ©rences collectives et les valeurs qui sont parfois bousculĂ©es par ces innovations restent nationales ou en tout cas rĂ©gionales et c’est une rĂ©alitĂ©. C’est la premiĂšre fois qu’à ce point, avec cette rapiditĂ©, nous avons l’émergence d’innovations Ă©conomiques et industrielles et de changements aussi profonds qui se font sans les Etats, mĂȘme parfois en contournement des Etats, et qui n’ont pas pensĂ© leur propre cadre rĂ©gulatoire. Donc, cette tension gĂ©ographique, elle va Ă  un moment devoir s’installer et je pense que nous devons l’installer Ă  travers le dĂ©bat sur l’intelligence artificielle parce que c’est la capacitĂ© de souverainetĂ©. Qu’est-ce que c’est la souverainetĂ© que j’ai plusieurs fois Ă©voquĂ©e ici ? C’est l’autonomie au sens strict du terme, c’est la capacitĂ© avant tout Ă  choisir pour vous-mĂȘmes les normes auxquelles vous serez soumis. Et si vous renoncez Ă  votre souverainetĂ© de fait parce que vous acceptez qu’un phĂ©nomĂšne est mondial et qu’en quelque sorte, la reterritorialisation vient bousculer des valeurs, mais c’est un phĂ©nomĂšne que vous acceptez de ne pas toucher ou de subir, eh bien vous acceptez que les rĂšgles du jeu de votre quotidien sont dĂ©cidĂ©es par d’autres et donc vous perdez votre autonomie sur des sujets majeurs. Moi, je crois dans l’autonomie et la souverainetĂ© parce que je crois dans les systĂšmes dĂ©mocratiques - on n’a quand mĂȘme rien inventĂ© de mieux. Ce sont les systĂšmes, pour reprendre des formules qui concernent le secteur, c’est le systĂšme le plus bottom up de la Terre la dĂ©mocratie, parce que ce sont les gens qui dĂ©cident. Et donc je crois qu’il faut permettre l’ancrage dĂ©mocratique de cette Ă©volution en en assurant donc les rĂšgles de transparence et de loyautĂ©, mais en s’assurant aussi que cette tension entre un phĂ©nomĂšne mondial et des prĂ©fĂ©rences qui sont parfois nationales ou rĂ©gionales soit prĂ©servĂ©e. Et donc nous allons rentrer aussi dans une phase oĂč il nous faudra avoir ces dĂ©bats dĂ©mocratiques. Puis enfin, c’est une tension temporelle. Je ne peux pas finir ce propos sans l’évoquer, c’est notre responsabilitĂ© Ă  tous. Ça va trĂšs vite. Les gens les plus talentueux pensent dĂ©jĂ  le monde de demain ou d’aprĂšs-demain. J’en ai donnĂ© une toute petite part, celle qui m’a Ă©tĂ© donnĂ©e de voir et de comprendre. D’autres sont dĂ©jĂ  beaucoup plus loin en avance mais il y a 20 % de notre population qui ne maĂźtrisent pas l’accĂšs Ă  ces technologies ou qui en ont peur et on ne peut pas construire des choix dĂ©mocratiques Ă©clairĂ©s si on reste dans cette situation parce qu’il y a une phase de digestion dĂ©mocratique qui va avec les usages de toute la population ou en tout cas d’une large majoritĂ© et l’accĂ©lĂ©ration de nos technologies. Donc, il va nous falloir articuler collectivement – et ça, c’est entre les acteurs industriels, Ă©conomiques, les chercheurs et les acteurs Ă©tatiques ou europĂ©ens, internationaux –, il va nous falloir trouver l’équilibre dans cette tension permanente qui sera la nĂŽtre sur ce sujet oĂč, chaque jour, nous aurons le sentiment d’ĂȘtre PromĂ©thĂ©e mais oĂč il nous faudra voir, comme disait RIMBAUD, la dure rĂ©alitĂ© Ă  Ă©treindre, paysan ». Et PromĂ©thĂ©e finit mal quand il oublie le paysan, surtout dans des dĂ©mocraties. Et donc cette tension-lĂ , il nous faudra aussi la vivre et on n’est pas forcĂ©ment le plus moderne quand on oublie son voisin de palier parce qu’on vit Ă  la fin avec son voisin de palier. Et ça, c’est quelque chose qu’il nous faut aussi penser dans les innovations qui sont les nĂŽtres. Donc, c’est ce cadre qui suppose Ă©videmment d’investir massivement dans la diffusion technologique et dans l’éducation et c’est le choix que nous avons fait depuis l’étĂ© dernier, dĂšs la maternelle et tout au long de la formation jusqu’au supĂ©rieur, d’avoir ce choix de former, de former aussi aux pratiques numĂ©riques. Nous allons introduire aussi une formation Ă  l’éthique liĂ©e au numĂ©rique parce que nous avons besoin aussi que nos futurs concitoyens soient formĂ©s Ă  ces transformations. VoilĂ , Mesdames et Messieurs, j’ai dĂ©jĂ  Ă©tĂ© trĂšs long mais c’est un continent que vous m’avez proposĂ©, avec vous, d’embrasser. Au fond, nous en revenons Ă  une nouvelle Ă©tape trĂšs cartĂ©sienne de cette facultĂ© d’ĂȘtre maĂźtre et possesseur de la nature et c’est dans cet Ă©quilibre qu’il faut toujours jouer et construire notre action. La stratĂ©gie que je viens de prĂ©senter et qui procĂšde des travaux que nombre d’entre vous ici, dans cet amphithéùtre, avez construits, elle sera constamment Ă  revoir. Ce n’est pas un objet vertical et figĂ© parce que dans six mois, un an il faudra l’adapter, le transformer, le bousculer. Mais je crois qu’à date, ces quatre piliers que j’ai prĂ©sentĂ©s sont les quatre convictions profondes qui vont prĂ©sider Ă  nos choix, nos investissements, l’esprit de nos lois et l’engagement de la France et, je l’espĂšre trĂšs profondĂ©ment, l’engagement de l’Europe pour rĂ©ussir justement cette aventure de l’intelligence artificielle. Donc, vous l’avez compris, je souhaite que la France soit l’un des leaders de cette intelligence artificielle, je souhaite que l’Europe soit l’un des leaders de cette intelligence artificielle. Nous en avons les moyens et nous allons en crĂ©er les conditions, d’abord, parce que je pense que c’est bon pour notre pays, ensuite parce que je pense que ça crĂ©e des opportunitĂ©s, enfin parce que je pense qu’il n’y a aucune chance de prĂ©tendre en contrĂŽler les effets ou avoir son mot Ă  dire sur tel ou tel effet pervers si on a ratĂ© la bataille du dĂ©but, c’est-Ă -dire d’ĂȘtre un acteur de cette aventure. Donc, je ferai tout pour que nous rĂ©ussissions, pour que nous soyons dans l’excellence de la formation, de la recherche et l’excellence Ă©conomique et industrielle en la matiĂšre et je ferai tout pour que nous soyons aussi le lieu oĂč l’on pense de maniĂšre coopĂ©rative, ouverte, entre toutes les sciences, entre nos concitoyens et les acteurs de, justement, cette transformation pour qu’on pense l’intelligence artificielle, ses consĂ©quences, sa place dans la sociĂ©tĂ© parce que ce sera le meilleur moyen de rĂ©flĂ©chir ensemble Ă  la sociĂ©tĂ© que nous voulons construire. Merci pour votre engagement et, comme vous l’avez compris, vous pouvez compter sur moi – je le dis ici sans aucune innocence – pour construire la vĂ©ritable renaissance dont l’Europe a besoin. Merci Ă  vous. . 544 600 448 45 203 333 182 397

elle est parfois artificielle ou bien encore naturelle